- R�alisateur : Mel Brooks
- Acteurs : Cloris Leachman, Mel Brooks, Harvey Korman
- Box-office : 0613239268
Le Grand Frisson, de Mel Brooks
Avec : Mel Brooks, Cloris Leachman, Harvey Korman
Année : 1977
Lorsqu’un maître du burlesque transforme le cinéma d’Hitchcock en parodie, et ce, non sans traduire jusque dans le texte quelques-uns des meilleurs moments de l’œuvre du pape du suspense, cela donné Le Grand Frisson. Une comédie indispensable comme on n’en fait plus…
Entièrement dédié aux films d’Alfred Hitchcock, à commencer par Sueurs froides (1958), le sixième film de Mel Brooks est un chef d’œuvre comique dont le retentissement résonne aujourd’hui encore (les ZAZ et les Nuls, parmi tant d’autres, s’en souviendront).
Sorti en 1977, il vient parachever la première décennie de carrière du cinéaste, après les réussites de ses films Les Producteurs (1968), Frankenstein Junior (1974) ou encore La Dernière Folie de Mel Brooks (1976). Non content d’avoir atteint grâce à Frankenstein Junior le firmament de la parodie avec l’un des plus beaux hommages jamais rendu au cinéma de James Whale, papa de Frankenstein (1931) et de L’homme invisible (1933), le metteur en scène récidive alors en explorant cette fois l’univers inépuisable du maître du suspense. Forcément, c’est l’un des instants les plus drôles, sophistiqués et inventifs de sa vie de cinéaste.
Quelques années avant de basculer dans le potache de La Folle Histoire de l’espace (1987) ou Dracula, mort et heureux de l’être (1995), il trouve l’équilibre parfait entre le loufoque abracadabrant et le culte infini – mélange indispensable à toute parodie. Avec en rôle-titre un Mel Brooks en Nobel de psychiatrie et nommé Richard H. Thorndyke, l’intrigue suit d’abord le protagoniste fraîchement nommé à la tête d’un asile psychiatrique de Los Angeles dont l’ancien responsable est mort dans des conditions étranges – un clin d’œil au film La Maison du docteur Edwardes. Puis le film fait de Thorndyke (référence directe au Roger O. Thorhnhill de La Mort aux Trousses) un faux coupable comme dans tout film de Hitchcock qui se respecte. Victime d’un complot lors d’un congrès de San Francisco, le personnage fait bientôt l’objet de crises de panique et de vertige à l’image du James Stewart de Sueurs froides.
De gag en gag, tous mis en scène avec un soin méticuleux et avec un respect évident pour l’œuvre d’Hitchcock, les citations de films s’égrainent par dizaines et à une vitesse ahurissante. Il y a bien sûr l’inoubliable scène de la douche de Psychose, les oiseaux qui se réunissent à l’arrière plan comme dans Les Oiseaux, ou encore un coup de téléphone (comme dans Frenzy) où est mentionné le point de rendez-vous "north by northwest", à savoir le titre original de La Mort aux Trousses. Aussi, on remarque un travelling se terminant par un gros plan (celui du tueur) : il s’agit d’une composante essentielle de la mise en scène d’Hitchcock, notamment présente dans Les Enchaînés, Le Procès Paradine et Pas de printemps pour Marnie. Enfin, notons l’analogie entre l’infirmière Diesel et l’inquiétante Mrs Danvers dans Rebecca.
Force est de constater que Mel Brooks dispose d’une connaissance encyclopédique des films originaux. Sa parodie n’est pas seulement là pour amuser. C’est même d’abord un hommage éclatant et à la limite de la poésie, et ce, sous couvert d’un humour qui brocarde et froisse amicalement. À noter qu’Alfred Hitchcock s’était montré touché par cette comédie, allant même jusqu’à faire envoyer une bouteille de champagne à Mel Brooks pour le féliciter.