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Alfred Hitchcock - PAS DE PRINTEMPS POUR MARNIE (1964)

Tippi Hedren et Sean Connery s’entichent chez Hitchcock, sur fond d’hystérie et de kleptomanie. Suspense, thriller… mais également une synthèse de tout l’art du réalisateur, avec ce qu’il compte de côté obscur.

Le pitch

Marnie est kleptomane. Dès que l’occasion se présente, elle s’enfuit avec la caisse, change d’identité et se fait engager ailleurs. Le patron Mark Rutland la reconnaît, mais fait comme si de rien n’était et l’embauche comme secrétaire comptable. Il tente sans succès de la séduire, et bientôt elle s’éclipse avec l’argent du coffre-fort de l’entreprise. Retrouvant aussitôt sa trace, il lui laisse le choix entre le mariage et la dénonciation à la police…

Pourquoi c’est un incontournable

Parce que « Pas de printemps pour Marnie  » est un des sommets de mise en scène d’Alfred Hitchcock. Quand bien même le cinéaste ressort de sa période la plus faste – de « Fenêtre sur cour » à « Psychose  » en passant par « Vertigo  » et «  La Mort aux trousses » –, il n’en finit pas pour autant de pousser le curseur de la modernité à son zénith.

Parce que Tippi Hedren et Sean Connery.

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Parce que le long-métrage est certainement le plus psychanalytique de la filmographie d’Hitchcock, avec « Vertigo  » et «  La Maison du docteur Edwardes ».

Une tonalité de thriller psychologique qui prît néanmoins de court les spectateurs d’alors, qui s’attendaient à un nouveau « Psychose  » ou « La Mort aux trousses ».

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Quelques scènes prodigieuses comptent parmi les plus célèbres de sa carrière. D’abord, il y a le premier jour de travail de Marnie chez Mark Rutland, avec en seulement quatre plans successifs totalement mutiques (celui sur l’intérieur de l’entreprise s’approchant de Marnie ; l’ouverture du coffre par la secrétaire ; Marnie de face en proie à un trouble, avec derrière elle un Mark suspicieux ; la vision subjective de Mark, qui la regarde surveiller le coffre) tout le scénario du film condensé. Il y a aussi la scène du vol, bijou de suspense voyant Marnie retirer ses chaussures pour ne pas attirer l’attention de la femme de ménage toute proche.

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La Hitchcock’ touch

L’art proprement hitchcockien du film se niche dans son recours hypnotique et symbolique à la couleur, comme s’il couronnait tout le travail d’Hitchcock entrepris en la matière avec ses films précédents (« Vertigo  », notamment).

Ainsi, le jaune serait une façon pour le scénario de s’adresser au spectateur, quand le rouge harangue quant à lui directement le personnage de Marnie. Or, il est vrai que dès l’ouverture du film (avec Marnie de dos marchant le long d’un train), le sac jaune dit quelque chose au spectateur, lui traduisant lentement l’une des caractéristiques du personnage – ici la kleptomanie, sans oublier bien en creux la privation sexuelle à travers la fente du sac, mise en évidence comme un sexe symbolique.

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Tandis que les rouges sang ravivent le passé trouble de Marnie. Mais pour aller plus loin, disons que le jaune s’attache à la frustration là où le rouge réveille le traumatisme, apaisé notamment par le blanc des chrysanthèmes.

Définitivement, réside quelque chose d’un peu malade et foutraque dans «  Pas de printemps pour Marnie ». De ces marques qui révèlent la volonté d’Hitchcock de traduire plus que jamais ses propres démons.

Deux éléments du film comptent parmi les ressorts les plus expérimentaux du cinéaste : d’un côté la transparence dans la séquence du cheval, effet étrange inscrivant Marnie dans une sorte de rêve, dans une réalité parallèle isolée du monde réel ; de l’autre la toile peinte avec le port en perspective, fantasmagorie représentant là aussi l’horizon imaginaire de Marnie, entre le faux-semblant de sa mère et de la réalité.

Le caméo d’Hitchcock a un rôle plus dramatique qu’à l’accoutumée dans « Pas de printemps pour Marnie  » : le réalisateur apparaît brièvement à la cinquième minute dans le couloir de l’hôtel peu après le passage de Tippi Hedren. Son regard furtif vers la caméra, qui fait sortir du film, semble glisser un aparté au spectateur, dopant le mystère d’une Marnie alors encore incognito.

L’analyse

Avec « Pas de printemps pour Marnie », Alfred Hitchcock transpose dans les années 1950-1960 un cas clinique de Sigmund Freud de la fin du XIXe siècle. À la différence près que celui qui incarne l’analyste se trouve être le mari de la patiente, et qu’il est éperdument amoureux de celle-ci. Le personnage de Marnie compose avec un traumatisme infantile refoulé (un drame dissimulé par une amnésie) lié à la mère – et plus précisément à sa haine des hommes. Résultat, Marnie fait l’objet en retour d’une phobie du genre masculin. Frigide, elle choisit de vivre avec des chevaux. Il s’agit d’un cas freudien typique, assimilé au temps du neurologue à une hystérie.

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Reste que dans cette équation, Mark, le mari joué par Sean Connery – s’il joue parfaitement l’analyste vicieux comme le désire Hitchcock – se trouve lui aussi aux prises d’une pathologie. Difficile en effet d’expliquer autrement pourquoi cet homme si fortuné et charismatique, qui peut avoir à peu près toutes les femmes qu’il souhaite, choisit à dessein la plus maladive. Or, dans ses entretiens avec Truffaut (« Hitchcock/Truffaut édition définitive », Gallimard, 1993, p. 257), Hitchcock souligne que Mark Rutland est précisément aussi névrosé que Marnie, en cela que son amour fétichiste ne se porte que sur un certain type de femme : la voleuse.

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À cela, on pourra ajouter qu’Hitchcock lui-même et avec lui le spectateur, sont tout aussi névrosés. À la vision de « Pas de printemps pour Marnie », notre plus grand désir n’est-il pas que Marnie échappe à la prison et ne se fasse jamais prendre, et ce, en dépit de sa nature de voleuse ?

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Demeure cependant un élément inquiétant – parmi les nombreux détails partout infiniment sinistres du long-métrage – dans « Pas de printemps pour Marnie » : l’ambiguïté de la scène de sexe entre Marnie et Mark. Donnée à voir du point de vue subjectif de Marnie, avec son aversion du masculin et son traumatisme infantile qui prennent le dessus, celle-ci ressemble fortement à un viol – d’aucuns parlent d’une scène d’amour filmée comme un meurtre. Mais il s’avère difficile – voire impossible – aujourd’hui avec le recul de ne pas y déceler la preuve la plus radicale du rapport fétichiste qu’entretient Hitchcock à l’égard de l’oppression du personnage féminin.

On sait à présent que le tournage de «  Pas de printemps pour Marnie » fut très délicat, notamment parce que le cinéaste, obsédé par Tippi Hedren, se montra très pressant voire désagréable et carrément incorrect avec l’actrice. Comme si tous les fantasmes du metteur en scène rejaillissaient cette fois à la surface du réel, sans que l’art ne suffise plus à contenir ses pulsions. De fait, il n’est pas ridicule d’interpréter la posture de démiurge/analyste pervers de Mark – et avec cela le viol allégorique qu’il commet – comme un moyen pour Hitchcock de canaliser ses propres désirs concernant Tippi Hedren.

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Notons que l’actrice, après avoir repoussé le harcèlement et les avances du réalisateur en marge des plateaux, paya très cher sa franchise : Hitchcock n’hésita pas à briser sa carrière, juste après avoir rêvé pour elle l’Oscar, et quelques mois après avoir projeté de faire de celle-ci la nouvelle Grace Kelly.

La genèse

Le point de départ du film est un livre de 1960 signé Winston Graham : « Marnie ». Son récit gravite autour d’une jeune femme kleptomane et frigide cherchant un remède dans la psychanalyse.

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À l’origine, le rôle-titre est prévu pour Grace Kelly, mais devenue Grace de Monaco, cette dernière refuse et c’est Tippi Hedren qui est finalement choisie.

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