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Résumé :
Venues de la région parisienne, une jeune institutrice et sa petite fille passent sur la partie lozérienne du plateau de la Margeride. Elles vont entraîner avec elles, comme une volée de passereaux dépaysés, des gens, des tourments et des questions issus des villes. Sur ces hautes terres, deux mondes, en se croisant sans se toucher, brisent la boîte de Pandore et déversent au ras du ciel des nuées de maux que la neige couvrira bientôt.
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Nicolas Elie 7 juillet 2017
Sous la neige, nos pas - Laurence Biberfeld
Un roman de cette collection que j’aime d’amour. Chapeau à Cyril Herry et à Pierre Fourniaud. Ils ont le don pour trouver des textes qui tuent.
T’as remarqué que souvent je râle à cause du style qu’il y a pas, de l’impossibilité de reconnaître un auteur ou un autre à travers les mots posés sur le papier, de ne finalement pas trouver d’originalité dans les histoires racontées, comme si parfois certains écrivaient des choses qu’ils ont déjà dites, que tu as déjà entendues.
Pas là.
J’ai jamais lu une histoire comme celle-ci. Jamais. Et jamais, c’est pas souvent.
L’écriture a cette originalité d’être à la fois crue et poétique, même si, comme Desproges, j’y connais que dalle en polésie. Elle est dure, sans concession, mais elle t’emporte dans le village de La Margeride, tout au nord de la Lozère. Et là-bas, si t’es pas du coin, tu vas avoir du mal à t’y faire. Il fait froid. Quand le vent souffle dans la bruyère, c’est le feu dans la cheminée qui réchauffe les âmes. Les âmes, et les cœurs.
En 1985, Esther, elle arrive de Paris. La ville où il y a un ministère de la culture. Pas celle des poireaux, celle des livres. Et Esther elle est institutrice. Elle décide de tout lâcher et de partir vivre sur le plateau avec sa fille. La campagne, tout ça, pour les enfants, c’est bien. En plus, il y a des vaches, plein, et des chiens. Des hommes aussi, accessoirement. De ceux qui causent pas trop mais qui pensent. Ceux qui sont capables de t’accepter même si t’es pas d’ici. Ça te fait penser à quelque chose ?
En 2015, Esther, elle se souvient de ces moments, de ces années. De ces hommes et de ces femmes (pas beaucoup) qui ont fait corps autour d’elle pour la protéger de ceux qui lui voulaient pas que du bien. Ceux qui lui ont fait entrevoir que la famille c’est pas forcément celle du sang, comme disait M’sieur Bach. Elle se souvient de Vanessa, sa copine, venue la voir au village et qui a apporté dans son sillage des mecs louches et pas trop fréquentables. Vanessa, sa copine camée.
Les mots de Laurence Biberfeld, je te montre.
Chaque hiver qui passait leur arrachait des fibres et des tissus, exténuait leur barcasse de viande. Il lui semblait que chaque hiver était plus long, plus teigneux que le précédent.
Tu vois ce que je veux dire ?
C’est cette langue que j’ai si rarement croisée au fil de mes lectures.
Ces histoires de deux univers si différents et pourtant tellement semblables. Les mains de ces hommes, pleines de cette terre qu’ils saisissent à pleines poignées pour en faire de l’amour et des murs autour de ceux qu’ils aiment.
La chaleur du bol de café, la neige qui tombe parfois si drue qu’elle t’empêche de voir très loin, le soleil qui fait pousser les arbres et les enfants au milieu de la nature que tu croyais hostile.
Alors il y a Lionel, et puis Lucien, et puis la tourmente.
La tourmente s’empara du plateau, sifflant dans les serrures, miaulant sa rage incessante dans les fentes des portes, sous les fenêtres bousculées, déployant sa clameur d’océan démonté sur l’étendue giflée des champs.
Et puis il y a Juliette, la fille d’Esther. Une môme délurée au possible qui vit tellement fort que tu ne peux que l’aimer, toi aussi, comme les autres.
C’est une histoire simple, finalement.
C’est une écriture simple aussi.
Tellement simple qu’elle est juste belle, et qu’elle te prend aux tripes. Qu’elle te fait marcher dans la terre, lentement, comme si tu suivais le pas des vaches et des hommes qui les accompagnent.
Et puis il y a les femmes, aussi, dans ce roman.
Celles qui vivent là-bas, qui souffrent en silence, celles que les hommes utilisent, le jour, pour préparer les repas et les corvées de la ferme,
et puis celles qu’ils retournent, la nuit, comme des morceaux de viande utilisables à volonté, par tous, et par chacun.
Tu le savais pas non plus…
L’amour, là-dedans, je l’ai pas vu, pas lu.
Si. Pour une génisse.
Lucien, il l’aime, sa génisse.
Je vais pas te garder plus longtemps.
Si tu dois en acheter un ce mois-ci, prends celui-ci.
Fais-moi confiance, une fois de plus.