N°15 au palmarès des meilleurs livres du crime organisé selon BePolar
Où s’arrête le crime ordinaire pour devenir du crime organisé ? Est-ce l’apanage d’une petite partie d’individus intrinsèquement violents ? Tout système organisé dont la survie repose en partie sur l’illégalité est-il une mafia ? Quelles sont les différences entre la fiction et la réalité ? Autant de questions pas si simples associées au crime organisé auxquelles Richard Stratton apporte un début de réponse inattendu dans le dantesque et très crédible L’idole des camés.
L’histoire :
L’arrestation faisait la une des quotidiens new-yorkais. S’y étalait la photo d’une femme, d’environ trente ans, aux grands yeux noirs pleins d’appréhension, aux traits tirés, d’une pâleur de cire. On lui avait passé les menottes, des agents fédéraux l’agrippaient par le bras. De gros titres annonçaient : « la chute du dealer des étoiles » ou « la reine de la drogue serrée dans son nid ». Les fédéraux l’avaient arrêtée dans une maison supposée appartenir à une star du rock et avaient saisi deux kilos d’héroïne pure, deux cent cinquante grammes de cocaïne, trois cent quatre-vingt mille dollars en liquide, des échantillons de drogues diverses et un carnet d’adresses où se trouvaient beaucoup de célébrités.
Pourquoi ce livre est important :
L’idole des camés, c’est d’abord le roman de la « mafia hippie », ce crime organisé lié au trafic de cannabis, cette drogue dite « douce » réputée moins rentable pour les grandes organisations criminelles, largement cultivée par ses consommateurs avant les débuts de sa légalisation. On y suit le parcours poignant, inspiré de la réalité, d’une jeune femme, Sonia, happée par ce trafic et devenue une des dealeuses attitrées des stars.
L’auteur, Richard Stratton, est quasiment un « activiste » du cannabis, qu’il connait très bien pour avoir été trafiquant pendant vingt d’ans, avant d’être arrêté. Spécialiste des « mobs stories » (« mob » ayant en anglais une double signification, « peuple » et « mafia »), son livre une critique non voilée de l’Amérique installée des élites, petite minorité qu’il voit proclamer indûment droits et devoirs à l’ensemble de la communauté.
Cette Amérique est menacée par la chute de la reine de la drogue, aussi appelée « l’idole des camés » : arrêtée dans une maison appartenant à une star du rock, elle souhaite collaborer avec le FBI pour alléger les charges retenues contre elle et dispose pour cela d’un carnet d’adresses où figurent beaucoup de noms célèbres...
S’il s’agit bien d’une fiction, saluée par le grand écrivain Norman Mailer, il s’agit du roman « vrai » de la drogue et d’un système mafieux : celui de vrais responsables du trafic en cheville avec des flics ripoux, de procureurs avant tout soucieux de leur carrière, d’indicateurs peu fiables, de truands et de leurs avocats obnubilés par l’argent, de producteurs malhonnêtes. Tous ont plus ou moins maille à faire avec le trafic, se croisent parfois entre eux, mais chacun en dépend pour vivre, à des degrés divers. Un récit sans artifices, une vraie référence sur le trafic de cannabis.
Ce qu’il faut retenir (pour briller en société) :
1. Quelles différences entre cannabis, haschich et marijuana ? Le cannabis est la drogue issue du chanvre, et elle est obtenue soit à partir de ses pétales (marijuana), soit à partir de sa résine (haschisch). Pour l’anecdote, la Canebière, célèbre avenue marseillaise, s’appelait autrefois « la Cannebis » et tire son nom du commerce du chanvre : Marseille était en effet l’un des plus grands comptoirs de chanvre au monde, utilisé notamment pour la fabrication des cordages.
2. Condamné à 22 ans de prison pour importation et trafic de drogue, Richard Stratton a écrit L’idole des camés pendant les huit ans qu’il a effectivement passé derrière les barreaux. Il est devenu un spécialiste du monde des prisons et un consultant respecté sur ce sujet pour la télévision et le cinéma (série TV Oz, film Slam, documentaire Thug Life in D.C.).
3. Richard Stratton considère la marijuana comme un facteur de création culturelle et politique. Pour lui le combat pour sa légalisation est une métaphore de la démocratie américaine en action, un exemple massif de cette désobéissance civile (concept inventé par le très influent philosophe américain David Henry Thoreau) chère à une partie de l’opinion américaine, en opposition ouverte avec le gouvernement.