- Réalisateur : George Kay
- Acteurs : Clotilde Hesme, Omar Sy, Ludivine Sagnier
- Distributeur : Netflix France
- Nationalité : Américaine, Français
- Durée : 5 épisodes de 45 minutes
Série indigente, plombé par un scénario sans inspiration et une mise en scène médiocre, Lupin suscite globalement l’ennui.
Ce nouvel avatar de Lupin n’est pas le célèbre gentleman-cambrioleur lui-même, mais il en a conservé l’esprit : c’est, a priori, l’originalité de cette production Netflix. Loin de l’aimable adaptation télévisée des années 70, qui affadissait et folklorisait quelque peu le personnage, n’en retenait que l’aimable apparence, les cinq épisodes de cette création renouent avec la problématique sociale sur laquelle se construit le héros originel. Rappelons en effet qu’Arsène Lupin commet son premier fait d’armes (le vol du collier de la reine Marie-Antoinette) pour venger les brimades subies par sa mère, qui fut femme de chambre et exploitée par de riches bourgeois, en l’occurrence ses propres cousins. Dans la série, le larcin dérobé au musée du Louvre, au cours d’une vente aux enchères, devient un objet de chantage qu’Assane Diop utilise pour obtenir la vérité sur ce qu’il considère comme une iniquité : la mort de son père, selon lui injustement accusé, mais d’abord toisé par un patron méprisant.
Dans "l’ombre de Lupin", le protagoniste diffère du célèbre bandit : il ne vit pas, tel son glorieux aîné, une dichotomie entre son origine populaire et son existence au sein de l’aristocratie, parce que, conscient de mener un combat qui transcende sa simple biographie et le confronte aux injustices de classes, il ne considère pas la vie mondaine comme un horizon prioritaire.
Le héros de la série est sans cesse ramené à son passé, qui coïncide avec une constante humiliation, d’où les nombreuses analepses permettant de comprendre son itinéraire et les motivations de ses actes. Si le procédé s’avère un peu trop systématique, si la causalité profile des scènes plutôt convenues, on ne peut pas nier que cette relecture d’un célèbre mythe littéraire résonne avec des problématiques à la fois actuelles et anciennes : la discrimination des catégories les plus défavorisées, en lien avec les inégalités sociales et économiques, ou la corruption d’une certaine bourgeoisie, même si l’on ne dira pas que ses membres sont uniformément mus par de semblables desseins, on laisse le soin de découvrir pourquoi.
Au fil des épisodes, l’univers s’assombrit, dans la mesure où la quête du héros devient une vengeance. Sur cette trame, hélas, le scénario achoppe : les adjuvants s’avèrent grossièrement esquissés (exemplairement la journaliste d’investigation, d’abord dépitée, puis ragaillardie par la guerre menée au méchant notable), les intermédiaires coupables sont plutôt ridicules (le commissaire "cuisiné" par Assane au cours d’une interminable séance d’interrogatoire est bien peu crédible), les scènes sentimentales allongent la sauce qui devient sirop, certaines séquences interminables (comme un long voyage en train jusqu’au Havre) diluent nettement l’attention.
Quant au héros, sans peur et sans reproche, aussi lisse qu’un lac par temps calme, il n’est qu’un nouvel avatar d’un certain nombre de personnages joués par Omar Sy, depuis des années, au cinéma. Chacun étant à sa place, les péripéties cheminent vers un cliffhanger attendu, et l’ensemble agace, d’autant que l’esthétique de la mise en scène ne rattrape pas l’indigence du scénario : pleine d’affectation, elle oscille entre la pub pour parfum et la bande-annonce perpétuelle.
Bref, Lupin ne capitalise que sur la rencontre d’un personnage patrimonial et d’un acteur bankable. Les fans de Maurice Leblanc y retrouveront l’emballage, sans le contenu : Etretat, le pseudo sur Twitter et son 813 conclusif, des couvertures de livres, dont on a retenu quelques vagues passages. Tout ça pour ça ? Oui, vraiment.