Du roman filandreux de DOA, qui entremêlait habilement thriller politique et roman d’espionnage, sur fond de paranoïa post-11-septembre, Laëtitia Masson tire une mini-série en quatre épisodes plutôt ennuyeuse, qui privilégie d’abord les saynètes édifiantes et existentielles, dans les dimensions d’un film choral. Le contexte ? Un projet d’un attentat islamiste en plein Paris, par le truchement d’un produit chimique toxique destiné à fabriquer une bombe, mobilise l’action des services secrets qui doivent mettre la main sur l’arsenal avant que le drame n’arrive. Hélas, dès les premières minutes, les personnages figés dans des postures archétypales, comme ce vieux briscard de l’enquête politique qui prend sous son aile une jeune journaliste, sont peu avares de phrases sentencieuses ("toutes les grandes œuvres sont des vengeances"), et ils ne donnent pas très envie de croire dans leurs destins, ni d’accorder un profond intérêt à leur existence au service de l’État français.

Certes, de prime abord, Laëtitia Masson semble marcher sur les traces de Bertrand Bonello, qui, dans Nocturama, savait tisser les fils à travers une trame scénaristique efficace, ménager un crescendo angoissant jusqu’à une acmé en mode claustrophobe. Mais Citoyens clandestins n’est pas de bois-là et il a vite raison de notre patience, multipliant les digressions pour donner à un casting luxueux (Arditi, Duvauchelle, Stocker) une partition trop globale, comme si chacun méritait son morceau de bravoure. Seul le rappeur Gringe, dans le rôle d’un espion infiltré, s’en sort avec les honneurs.

En fait, cette création souffre d’un problème d’écriture, car le background psychologique alourdit plus qu’il ne sert la série, plombant le rythme dès le début, Laëtitia Masson choisissant de documenter la mélancolie de ses protagonistes en mode baudelairien. Et on ne peut pas dire que la mise en scène soit particulièrement inspirée, comme en témoigne un usage répété du champ-contrechamp lors des échanges à deux, avec personnage en amorce dans quelques plans bien paresseux. Si l’on aime l’action intriquée à des problématiques géopolitiques, sans maniérisme aucun, Citoyens clandestins n’est assurément pas le bon choix.