Au XIXe siècle, dans les arrière-cuisines des presbytères, dans les annexes domestiques des maisons bourgeoises, on ne tarissait pas d’éloges à propos des talents culinaires d’Hélène Jégado. Cette jolie jeune femme aurait empoisonné à l’arsenic 97 personnes, dont 60 auraient succombé... Portrait de « celle qui tuait de sang-froid dans de bons petits plats chauds* ».
Hélène Jégado est née en 1803 à Plouhinec et fut dès sa tendre enfance biberonnée aux contes et légendes de la Basse-Bretagne, notamment ceux convoquant la figure de l’Ankou. Sa mère notamment, une femme froide, dépourvue d’affection, reporta notamment sur sa petite fille sa peur de l’Ankou, autrement appelé « l’archange de la mort ». Hélène devint orpheline à sept ans et fut élevée par une tante qui lui apprit très tôt la cuisine, un domaine dans lequel elle excellait. Tourtes, ragoûts, sauces : elle devint rapidement réputée pour ses talents.
Poudre blanche et soupe aux herbes
« En 1833, Hélène entra au service de M. Le Drogo, prêtre à Guern. Dans cette maison, en trois mois, du 28 juin au 3 octobre 1833, décédèrent sept personnes, parmi lesquelles Anna Jégado, la sœur d’Hélène, le père et la mère du recteur, et M. Le Drogo lui-même », peut-on lire à l’époque dans la chronique judiciaire du Figaro. Aussi déterminée qu’aléatoire, la jeune femme sillonne la Bretagne de part en part, empoisonnant, depuis ses fourneaux, ceux pour qui elle cuisine : hommes, femmes, vieillards et même nourrissons... Elle gardait dans ses bagages des reliques dont elle détroussait soigneusement ses victimes...
Confondant d’évidence…
À cette époque, une épidémie de choléra dont les symptômes étaient similaires à ceux d’un empoisonnement à l’arsenic, sévissait en Bretagne. Sous la figure incantatoire de l’Ankou, Hélène Jégado a ainsi pu tuer sans être appréhendée, jusqu’à ce qu’elle nourrisse les soupçons de son dernier employeur, l’avocat et professeur de droit Théophile Bidard de la Noë, qui, suite à la mort suspecte de trois de ses domestiques, requit une autopsie qui révéla un empoisonnement à l’arsenic. Accusée de 3 meurtres et de 3 tentatives d’empoisonnement, la justice ouvrit, le 6 décembre 1851, le procès de « La Jégado », surnommée « La sorcière de Bretagne », En effet, la prescription légale à l’époque était de dix ans ! Pendant tout le temps que dura le procès, la jeune femme nia farouchement les accusations alors même que les autorités retrouvèrent de l’arsenic dans ses bagages. Elle fut guillotinée à l’âge de 48 ans le 26 février 1852 à Rennes, sur le Champ de Mars.
À voir / à lire :
Fleur de Tonnerre, Jean Teulé, Jean Teulé, Julliard, 2013 (roman)
Fleur de Tonnerre, avec Déborah François et Benjamin Biolay, de Stéphanie Pillonca-Kervern, 2017 (film)
S.A.
Sources : Wikipédia.fr ; *madame.lefigaro.fr ; rtl.fr ; criminocorpus.hypotheses.org