- Auteur : Armèle Malavallon
- Editeur : Ramsay
L’interrogatoire d’Armèle Malavallon pour son nouveau roman, La Pire espèce.
A l’occasion de la parution de La Pire espèce aux éditions Ramsay le 15 septembre dernier, Armèle Malavallon revient sur l’écriture de ce nouveau thriller.
Bepolar : Comment est née l’idée de ce roman ? Qu’aviez-vous envie de faire avec cette histoire ?
Armèle Malavallon : Lorsque je me suis mise à écrire de façon sérieuse, ma profession de vétérinaire et mon expérience m’ont tout naturellement conduite à écrire des histoires, des nouvelles mettant en scène des vétérinaires et/ou des animaux.
Et puis je me suis mise au polar, j’ai exploré d’autres sujets, tout en conservant un intérêt particulier pour la partie médico-légale, scientifique d’une intrigue et en continuant d’inclure dans mes histoires un véto par ici, un chat par là...
Cela restait assez anecdotique, c’était en quelque sorte ma patte, mon fil rouge.
Avec ce roman, j’ai eu envie d’aller plus loin et de faire des vétérinaires les héros de mon histoire. Je pense qu’un écrivain n’est jamais aussi bon que lorsqu’il parle d’un sujet qu’il maîtrise parfaitement et qui lui tient à cœur. Après "Soleil Noir" et "Dans la peau", j’ai senti que c’était enfin le moment d’écrire sur ce métier qui est presque toujours une vocation profonde, une passion inspirée par l’amour porté aux animaux. J’avais envie d’aborder par ce prisme le sujet de la condition animale, les vétérinaires ayant, selon moi, un rôle extrêmement important à jouer dans l’amélioration du bien-être animal dans notre société.
Bepolar : Comment pourriez-vous nous présenter le personnage de Clément ? On y parle de la maltraitance des animaux. C’est un sujet qui vous tenait à cœur ?
Armèle Malavallon : Clément Katz est un vétérinaire français d’une quarantaine d’années au profil assez atypique. Bien loin du classique vétérinaire installé dans sa clinique en ville ou à la campagne, il passe la majorité de l’année au Congo Brazzaville où il officie dans un centre de réhabilitation pour les chimpanzés. Une ou deux fois par an, il rentre en France pour effectuer des remplacements soit en clientèle libérale soit dans le cadre de missions pour les Services Vétérinaires. Ces séjours en France lui permettent de gagner un peu d’argent, notamment pour entretenir sa fille qu’il peut ainsi voir lorsqu’il rentre au pays. Mais c’est un baroudeur qui n’aime rien tant que la vie dans la jungle africaine, au plus près des animaux sauvages.
Dans "La Pire espèce", Clément Katz arrive à Montpellier pour effectuer un remplacement à l’abattoir de Peyrac. Il se retrouve confronté à la maltraitance sur les animaux d’abattoir et décide de ne pas fermer les yeux sur ces pratiques. Au même moment, un fait divers secoue la région : deux hommes ont massacré des lapins dans un refuge et ont filmé leurs "exploits" pour les diffuser sur Internet.
À travers ce roman, j’ai voulu dénoncer la façon dont sont traités les animaux dans notre société, que ce soient les animaux dits de rente, qui souffrent dans les élevages intensifs et parfois lors de leur mise à mort à l’abattoir, ou d’autres animaux victimes de la violence et du sadisme de certains hommes qui n’ont aucune considération pour la vie animale.
C’est un sujet qui, évidemment, me tient beaucoup à cœur et j’ai essayé de l’aborder de façon objective et, je l’espère, modérée, loin des positions extrémistes qui enflamment trop souvent le débat et empêchent d’avancer. Selon moi, c’est par la loi et l’amélioration de la prise en compte du bien-être animal dans les textes officiels que nous pourrons faire bouger les choses. La France est très en retard sur ce sujet par rapport à d’autres pays d’Europe. C’est d’ailleurs pour cela que j’ai demandé à mon confrère le docteur Loïc Dombreval, député et président du groupe d’étude "bien-être animal" à l’Assemblée Nationale, d’écrire la préface de ce roman. Il fait un travail formidable et se bat chaque jour pour faire entendre la voix des animaux et faire changer les lois.
Bepolar : Pour avoir dit la vérité, Clément se fait tabasser par l’entreprise qu’il incrimine. Sauf que les responsables du passage à tabac disparaissent... Vous aviez envie d’un roman où la frontière entre le "bien" et le "mal" est floue ?
Armèle Malavallon : L’avantage de la fiction, c’est qu’elle nous permet de ne pas totalement respecter les règles et de faire en sorte que les "méchants" ne s’en tirent pas toujours à bon compte. Dans ce roman, je ne fais pas l’apologie de la violence contre la violence, ni de la vengeance à tout prix, c’est plus subtil que ça. Cependant, c’est tellement frustrant et désespérant de voir à quel point la maltraitance, voire les pires sévices infligés aux animaux sont peu punis par la Justice, les coupables s’en tirant à chaque fois avec juste une petite tape sur les doigts, que j’avais envie de rétablir un peu l’équilibre. Avec ce roman, j’ai voulu offrir une sorte de revanche virtuelle aux animaux, faire gagner le bien contre le mal, sans passer par la Justice des hommes qui n’est jamais du côté des animaux.
Bepolar : Vous êtes vétérinaire et on l’imagine, proche de tous ces sujets. Est-ce un avantage pour écrire un polar, ou au contraire une difficulté (vis à vis par exemple de la distance à prendre avec le récit) ?
Armèle Malavallon : J’aime à croire que c’est un avantage, car selon moi, on ne parle bien que de ce que l’on connaît. Après, j’ai effectivement essayé de garder une certaine distance avec le sujet, devant me mettre dans la peau des différents personnages, les gentils comme les méchants, les équilibrés comme les bizarres, les défenseurs des animaux (avec lesquels je ne suis pas forcément d’accord sur tout) comme les sadiques (avec lesquels je ne partage rien, pour le coup !).
J’ai longtemps cru qu’il me serait impossible de me mettre dans la peau d’un type qui prend plaisir à massacrer des animaux et c’est effectivement la partie qui s’est révélée la plus difficile pour moi.
Bepolar : Quels sont les salons et dédicaces à venir sur votre agenda ?
Armèle Malavallon : Malheureusement, la crise sanitaire liée au coronavirus a entraîné l’annulation de la plupart des salons du livre prévus cet automne et nous avons très peu de visibilité sur les mois à venir.
La Foire du livre de Brive, par exemple, a dû resserrer le nombre d’auteurs invités pour le week-end du 6 novembre de 300 à 60 en raison de la pandémie et organisera cinq autres week-ends tout au long de l’année 2021 avec les auteurs restants. Nous aurons le programme définitif fin septembre.
Néanmoins, je serai présente le 17 octobre au Salon du polar d’Aubigny qui, lui, semble se maintenir.
Bepolar : Et avez-vous déjà une idée de votre prochain roman ?
Armèle Malavallon : Oui, je travaille dessus depuis quelques mois déjà. L’action se passera toujours à Montpellier, mais cette fois, le héros sera un médecin biologiste travaillant à l’hôpital et flanqué d’un fringant chihuahua prénommé Hippocrate. On ne change pas les vieilles habitudes...