- Réalisateurs : Vince Gilligan - Peter Gould
- Acteurs : Bryan Cranston, Aaron Paul, Bob Odenkirk
La saison 6 de “Better Call Saul” vient d’être amorcée sur Netflix avec deux épisodes liminaires, en prévision de onze autres à venir. Que vaut l’entrée en matière de cet ultime chapitre du génial spin-off de “Breaking Bad” ?
L’ami Saul Goodman se retrouve encore et toujours dans de beaux draps, les inconditionnels des séries “Breaking Bad” et “Better Call Saul” en savent quelque chose. Les inséparables showrunners Vince Gilligan et Peter Gould ne changent rien à la recette flamboyante et virtuose de leur série. Comme à l’accoutumée, le prologue relève du flash-forward et continue d’illustrer la descente aux Enfers imminente de l’antihéros, cette fatalité du film noir qui se rapproche irrépressiblement d’épisode en épisode. Cette fois, un magnifique ralenti à la Antonioni (façon “Zabriskie Point”) s’attarde sur ses innombrables cravates - toutes plus criardes et tapageuses les unes que les autres - pour mieux donner à ressentir sa chute future. Dans une vaste demeure cossue, la sienne, une armée probablement envoyée par des créanciers dissèque et désosse chaque centimètre carré de sa titanesque garde-robe. Sur le sol, tombe un objet qui renvoie aux grandes heures des arnaques du grand Saul Goodman. Retour au présent de l’intrigue : Nacho Varga (excellent Michael Mando) tente d’échapper aux sbires du cartel à ses trousses, tandis que Saul essaye de ne pas griller la couverture de son terrible patron Lalo (inclassable Tony Dalton)…
Photographie au cordeau, objets transitoires et métaphoriques pour figurer les trajectoires des différents protagonistes principaux… la série “Better Call Saul” conserve dans sa sixième et dernière saison les particularités et effets qui font sa réputation. Les deux premiers épisodes de l’ultime chapitre, pratiquement construits comme un film, rivalisent d’habileté. Outre ses dialogues et acteurs toujours aussi mordants et irrésistibles, les péripéties passent tout de suite au premier plan. Plus encore que d’habitude, les personnages apparaissent dans l’action plutôt que dans la réflexion ou la mise en place de stratégies. Une constante en début de saison car il s’agit pour le scénario de reprendre au pied levé quelques-uns des événements et interrogations laissés en suspens dans le final de la saison 5.
De la lumière crépusculaire aux mouvements de caméra (plan-séquence en pagaille, notamment), rien n’apparaît jamais superflu ou tape-à-l’œil dans aucun des plans de ce début de saison. Chaque élément ou choix artistique trouve à chaque fois une utilité et se justifie - on appelle cette vision remarquable, tellement rare aujourd’hui, la mise en scène, et celle de “Better Call Saul” surclasse comme souvent l’écrasante majorité des productions contemporaines. Surprenant à certains égards (en bien), ce retour tant attendu comporte déjà quelques moments cultes. L’interprète principal, Bob Odenkirk, et sa complice bien-aimée Kim Wexler (Rhea Seehorn) apparaissent toujours aussi attachants et formidables. L’intensité, au choix, sinistre ou redoutable, des Gustavo Fring (Giancarlo Esposito), Mike Ehrmantraut (Jonathan Banks) et autre Howard Hamlin (Patrick Fabian) est bien entendu toujours de la partie. On en redemande, et donc vivement la suite…
La saison 6 de “Better Call Saul” a débuté sur Netflix depuis le 19 avril.