- Réalisateur : Mona Achache
Ce « true crime » étonnant et remarquable retrace la traque puis la condamnation de Guy Georges sous l’angle des victimes et femmes ayant permis sa capture. Superbe documentaire à ne pas manquer.
D’entrée, cet excellent "true crime" diffusé par Netflix se distingue des sempiternels documentaires criminels par sa conjugaison au féminin. Vingt années se sont écoulées depuis la condamnation en 2001 du tueur en série de l’Est parisien, Guy Georges. L’occasion pour Patricia Tourancheau, journaliste qui a suivi ces sombres événements à l’époque, et Mona Achache, brillante réalisatrice franco-marocaine – à qui l’on doit notamment "Le Hérisson" (2009) et "Les Gazelles" (2014) – de retracer l’affaire par le biais du regard d’une série de femmes ayant traversé l’histoire depuis l’intérieur : une mère de victime, une policière, ou encore des avocates.
Dès l’ouverture, lorsqu’on entend "Le Temps de l’amour" de François Hardy en guise de contrepoint à l’horreur (la chanson est jouée pendant que défilent les visages de jeunes femmes débordantes de vie, les victimes de Guy Georges), la tonalité si rare du documentaire, entre délicatesse et justesse, transparaît avec évidence. Loin d’être effacées voire gentiment gommées pour ne pas s’embarrasser de la moindre psychologie, comme c’est le cas habituellement dans la plupart des « true crime » (de Netflix ou d’ailleurs), les victimes demeurent au contraire au cœur de "Les Femmes et l’Assassin". En découle un éclairage assez inédit et des témoignages stupéfiants.
Pourquoi ça vaut le détour ?
Parce que les réalisatrices Mona Achache et Patricia Tourancheau adoptent un angle original, un point de vue singulier : non pas celui trop général et usité de la traque ou de l’analyse du profil du tueur en série Guy Georges – déjà nettement balisé par le cinéma ("L’Affaire SK1" de Frédéric Tellier…) et par de multiples documentaires (Faites entrer l’accusé…) – mais celui de toutes ces personnalités anonymes ou restées dans l’ombre ayant permis son emprisonnement. Et parmi ces personnes se trouvent en majorité des femmes, d’où "Les Femmes et l’Assassin". Il s’agit par exemple de Patricia Tourancheau, la journaliste (également coréalisatrice ici, auteure du documentaire sur l’Affaire Grégory pour Netflix) qui a suivi l’affaire Guy Georges pour le quotidien Libération (dans la rubrique Police-justice). Il s’agit aussi de la cheffe de la Brigade criminelle du 36 quai des orfèvres d’alors, Martine Monteil. Ou encore du regard d’Anne Gautier (la mère d’Hélène Frinking, violée et assassinée par Guy Georges), surinvestie à la fois dans le cadre de la traque du serial-killer puis lors du procès. Autant de visages indispensables, comme autant d’êtres sensibles et pénétrants, qui apportent une vision nouvelle pour repenser l’impensable autrement qu’à travers le sensationnel.