- Auteurs : Ian Manook, Karine Giebel, Jess Kaan, Cedric Lalaury, Valentine Imhof
C’est une question qui hante les lecteurs et les écrivains : pourquoi est-ce qu’on accroche ou pas à un polar ? Quelles sont les conditions pour que l’on vibre en lisant, en écoutant ou en regardant une histoire... Dans cette rubrique, on demande leur avis (en attendant les vôtres) aux premiers concernés, les auteurs et les autrices...
Valentine Imhof joue avec le feu avec son dernier roman, Zippo, qui flirte avec les univers sado-maso... Pour elle, ce qui fait un bon polar, c’est d’abord un ensemble d’éléments...
Question difficile… C’est une somme de critères qui tous n’ont pas à être présents, en même temps, dans le même roman... L’écriture, la qualité de l’écriture, me semble essentielle – une bonne histoire peut être gâchée si l’écriture (parfois la traduction) ne suit pas. On peut également être sensible à la virtuosité de la construction d’une intrigue, mais j’ai plus de goût pour des personnages fouillés, crédibles, dont les contradictions reflètent l’humanité dans sa grande complexité, et dont les motivations m’interrogent. J’aime aussi être un peu bousculée par la narration, qu’on ne me donne pas du pré-mâché, en saupoudrant trop libéralement indices et balisage générés par un algorithme… J’aime être désorientée, surprise, et comprendre ce qu’il y a à comprendre tranquillement, comme une grande, sans qu’on me donne forcément toutes les clefs…
Cedric Lalaury, l’auteur de Que les ombres passent aux aveux, évoque d’abord une atmosphère et des personnages...
– Un bon polar, c’est vraiment celui qui crée un monde, qui a une atmosphère propre et des personnages qui se libèrent du papier pour acquérir une épaisseur, m’intriguer, et aussi conserver une part de mystère. Je n’aime pas forcément tout savoir d’un personnage, et j’aime deviner, imaginer, ce qu’a été sa vie avant le roman, ce qu’elle sera après. Un bon polar, pour moi, c’est forcément une bonne histoire, et si possible, j’aime quand l’auteur ne m’ennuie pas trop avec sa science ou ses connaissances sur le lieu où se déroule l’histoire. Enfin, on sait qu’on a lu un excellent polar quand on y pense longtemps après l’avoir lu et qu’il en reste quelque chose en mémoire. On pourra le relire et découvrir des détails qui nous auront échappés lors d’une première lecture fiévreuse et tendue. C’est toujours un grand plaisir de constater que le roman n’a pas livré tous ses secrets d’un coup.
Pour Jess Kaan, qui vient de signer En Chasse, c’est aussi une question de rencontre...
Un livre c’est une rencontre entre un auteur et son lecteur. Donc ce qui fera un bon polar pour moi n’en fera pas un pour un autre, mais à mon avis, il faut qu’il brise la mer gelée en nous, il faut qu’il reste en toi, que tu y repenses de temps à autre. En fait, c’est valable pour tous les livres.
Enfin, les réponses de Karine Giebel, Sylvain Larue et Ian Manook sont plus courtes mais tout aussi percutantes...
Karine Giebel : Ce qui fait un bon roman (et pas seulement un bon polar ) : les émotions qu’il nous fait vivre, les traces qu’il laisse en nous.
Sylvain Larue : Je ne m’étais jamais vraiment posé la question, mais je dirais du mystère, du sang, de la peur. Et si possible, un bon personnage de méchant (qu’il soit le protagoniste ou l’ennemi).
Ian Manook : Tout ce qui fait que les Misérables en sont un.
Voilà, maintenant vous savez... enfin presque... On continuera notre quête de vérité dans quelques semaines avec cette rubrique...