- Réalisateur : Olivier Marchal
- Acteurs : Nicolas Cazalé, Alberto Ammann, Sofia Essaïdi, Assaad Bouab
- Auteur : Pierre Pouchairet
Première incursion sur Prime d’Olivier Marchal, "Overdose" repousse les limites du polar, entre sécheresse du récit et atrophie des personnages. Pour le pire ou pour le meilleur ?
Une cheffe de la brigade des stupéfiants de la police de Toulouse mène l’enquête à propos d’un go-fast entre l’Espagne et la France. Une investigation qui vire bientôt au drame et à la course contre la montre…
"Bronx", le précédent film d’Olivier Marchal, avait déjà commencé à donner la couleur, tout du moins à inoculer une défaillance : celle d’une tendance à la dilution du récit et des protagonistes, tous prisonniers d’une narration trop ronflante et convenue. Comme si la subtilité et le resserrement sagace de l’écriture s’évanouissaient au profit de l’épate et d’effets surlignés, conditions nécessaires au seul divertissement. En dépit d’une certaine efficacité et d’un semblant d’atmosphère, l’intrigue privilégiait donc les sentiers les plus balisés, quitte à basculer souvent dans la caricature, quelque part aux frontières de l’invraisemblance. "Overdose" perpétue malheureusement tous ces hiatus en les amplifiant considérablement, voire à l’infini, mais sans toutefois préserver de son aïeul la moindre qualité ou originalité.
Comme si tout ce qui constituait auparavant la singularité d’Olivier Marchal, le créateur de "Braquo" et papa de longs-métrages tels que "Gangsters", "MR73" ou encore "36 quai des Orfèvres", se retrouvait en définitive éclipsé. Mais éclipsé par quoi au juste ? Par l’uniformisation, à coup sûr, mais aussi par une propension monomaniaque à la récitation et à la rengaine. De là à s’imaginer que la brutale évaporation de ce qui incarnait le caractère du cinéma de Marchal s’explique en partie par le conformisme des supports de diffusion de ses derniers films – "Bronx" est disponible exclusivement sur Netflix, "Overdose" sur Amazon Prime –, il n’y a qu’un pas. Car si Olivier Marchal gagne clairement en visibilité grâce à ces deux prestigieux partenariats, ce qu’il y perd artistiquement s’avère abyssal. Ou alors on abandonne sciemment dans l’équation son habit de cinéaste et de metteur en scène, pour revêtir uniquement celui de l’homme d’affaires.
Quoi qu’il en soit, "Overdose" risque sans mauvais jeu de mot de provoquer l’overdose du spectateur, du moins l’indigestion de beaufitude et de masculinité forcenée. Sans aucune nuance, le film adapté librement d’un roman de l’ancien commandant de police Pierre Pouchairet aligne les stéréotypes au kilomètre. Or, bien rares semblent les comédiens – hormis l’actrice Sofia Essaïdi, étrangement juste malgré l’ineptie généralisée – à croire à cette mascarade de polar, série Z qu’on oublierait presque en cours de route, entre violence gratuite et grosses cylindrées. Il faut dire que cette comédie qui s’ignore apparaît pétrie de personnages archétypaux et de pseudo péripéties sans surprise – l’articulation des deux récits parallèles, piteux MacGuffin, est d’ailleurs catastrophique. Même les scènes d’action, aussi homogènes que rébarbatives, échouent à tous les niveaux - c’est dire.
Cela ne fait aucun doute, le passage du cinéma d’Olivier Marchal aux plateformes de SVOD tourne au jeu de massacre pour le réalisateur, sur le point de passer maître dans le formatage et l’indigence du récit. Ainsi, "Overdose" ressemble à un objet inconsistant, froid, stérile, presque cadavérique. Où tout – personnages, trajectoires, rebondissements ratés, dénouement – finit par s’effacer, s’annihiler, et disparaître dans le néant. C’est peut-être ça le degré zéro du polar : des ingrédients canoniques (courses-poursuites, fusillade, romance, drogue, policiers, malfrats…) jetés à la volée, éparpillés au hasard dans un maelstrom informe. Libre alors au spectateur de se saisir au vol de ces éléments désincarnés pour tenter de composer quelque chose de plus substantiel. Libre à lui d’inventer un "Overdose" échappant à la déliquescence avec ne serait-ce qu’une once d’intelligence, de pensée ou de réflexion. À savoir maintenant si Olivier Marchal relèvera prochainement le défi de réaliser une expérience limite de désertification encore plus radicale, plus loin encore dans les confins désolants de la liquéfaction.
Librement adapté du roman "Mortels Trafics" de Pierre Pouchairet, "Overdose" est disponible sur Prime depuis le 4 novembre.