- Réalisateur : Stanley Nelson
- Distributeur : Arte.tv
- Genre : Documentaire
- Nationalité : Américaine
- Date de sortie : 20 janvier 2003
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Résumé :
En 1955, l’assassinat au Mississippi d’un jeune Noir accusé d’avoir sifflé une femme blanche secoue les États-Unis, et joue un rôle primordial dans le déclenchement du mouvement pour les droits civiques. Portrait glaçant d’une Amérique capable de tous les extrêmes.
Un jeune Noir meurt dans les années 50, pour avoir sifflé une femme blanche. Enlevé, torturé et assassiné par un mari jaloux ainsi qu’un sinistre fermier raciste, Emmett Till est devenu un symbole de la ségrégation raciale et son décès a enclenché le renouveau du mouvement pour les droits civiques. Le documentaire de Stanley Nelson revient sur cette sordide affaire, alternant les images d’époque et les témoignages des proches de la victime, sur laquelle les avis convergent : ainsi, les camarades de classe et sa mère, Mamie Till, décrivent un adolescent spontané, joyeux, qui avait trouvé à Chicago une forme d’apaisement, après un début d’existence difficile, marqué par la mort de son père lors de Seconde Guerre mondiale.
C’est lors d’un voyage à Money (Mississipi) que Till perdra la vie. Dans cet État du sud, où le racisme impose la loi, les Noirs doivent faire profil bas : plus de cinq cents d’entre eux ont été lynchés depuis 1882. L’horreur des photographies soutient la réalité factuelle des crimes. Le documentaire exhibe quelques-uns de ces clichés pour s’inscrire dans le prolongement du geste militant de mamie Till, qui montra le corps de son fils défiguré, soulevant une vague d’indignation dans le pays. Cette fois, la mort d’un Noir ne serait plus un simple fait divers.
La stratégie des racistes a bien compris le danger : aux fins de banaliser le meurtre et de gommer son mobile, tous les discours qui ont défendu les assassins d’Emmett ont symboliquement tenté d’éliminer le corps du défunt. Il s’agissait, au-delà de sa réalité matérielle, d’en effacer la mémoire dans l’inconscient collectif, notamment pour nier que ce cadavre défiguré, vu par des milliers de Noirs dans son cercueil, ait été celui d’une personne qu’on tue pour sa couleur de peau. Pire : lors du procès, la défense des prévenus transformera le mort en un vivant qui se cache quelque part. Le négationnisme est une vieille antienne de la discrimination. Elle consiste toujours, dans une inversion mortifère, à transformer les victimes en coupables.
Mais bien loin d’avoir évité le pire, en resserrant les rangs autour d’une identité blanche, les racistes du Sud ont provoqué une forme d’effet Streisand avant l’heure. Quelques semaines plus tard, Rosa Parks refusera de céder sa place dans un bus. On connaît la suite.
Il faut dire que la mascarade de justice évoquée dans la deuxième partie du documentaire a jeté un bidon d’essence sur une opinion déjà enflammée. Depuis, les meurtriers Roy Bryant et J.W Milam ont avoué les faits en les monnayant leurs souvenirs, sans exprimer aucun regret. Emmett Till, lui, est devenu un jalon de la lutte anti-raciste et l’on aurait aimé que son martyre soit mis en perspective d’une manière plus globale, dans l’histoire d’un pays qui ne s’est pas débarrassé de ses vieux démons.
Le documentaire est disponible sur la plateforme arte.tv jusqu’au 29 juin 2025.