- Auteurs : Agatha Christie, Arthur Conan Doyle, Gaston Leroux, Edgar Allan Poe
Pourquoi Agatha Christie mérite-t-elle son titre de "souveraine du crime" ?
Oui, oui, nous pesons nos mots, la reine de toutes les reines, ce n’est ni la reine de Saba, ni Cléopâtre, ni qui que ce soit d’autres, mais un bout de femme née dans le comté de Torquay (sud-ouest de l’Angleterre) un jour de septembre 1890. Cette auteure, c’est Agatha Christie et elle a révolutionné un genre naissant, le polar dont elle a étudié méticuleusement les ressorts. Sa maîtrise totale du roman policier tel qu’il existait à son époque en fait une véritable architecte du crime.
Oubliez son image désuète, ses intrigues très marquées par son milieu socio-culturel et l’époque victorienne, celle du « glorieux » Empire britannique qui gouvernait le monde (ce qui en fait aussi le charme), relisez ses œuvres et ouvrez bien l’œil, car il s’agit du travail d’une orfèvre de l’intrigue.
Mais pourquoi couronner si impétueusement une auteure parmi d’autres, alors que c’est la diversité qui fait la richesse, en littérature comme ailleurs ? C’est que Christie cumule tous les attributs d’une souveraine du polar : une personnalité mystérieuse, de nombreuses innovations littéraires, des livres cultes, des personnages iconiques et un succès public monumental. Que demander de plus ?
Dès 1920 et son premier roman, La Mystérieuse Affaire de Styles apparaît le mythique Hercule Poirot, le détective belge dont la notoriété ne peut être comparée qu’à celle de Sherlock Holmes.
En 1926, premier chef-d’œuvre digne de figurer dans le palmarès des meilleurs polars avec Le Meurtre de Roger Ackroyd dont le dénouement stupéfiant ne peut à l’époque que se comparer aux intrigues d’Edgar Allan Poe, d’Arthur Conan Doyle ou au très célèbre Mystère de la chambre jaune de Gaston Leroux, trois figures fondatrices du polar et pères d’œuvres emblématiques.
Les années 30 sont celles de la consécration : apparition d’un nouveau personnage qui deviendra bientôt culte et emblématique des « détectives en fauteuil », Miss Marple, dans L’Affaire Protheroe (1930) et des chefs-d’œuvre d’intrigues et d’ambiance de la littérature mondiale, comme Le Crime de l’Orient-Express (1934), A.B.C. contre Poirot (1935), Mort sur le Nil (1937) ou Dix Petits Nègres (1939). Celle qu’on surnommait alors « La Duchesse de la mort » assoit son pouvoir et accède sans contestation au trône.
Ces sommets ne seront que les préludes d’une exploration minutieuse de ce que peut offrir le roman policier : qui peuvent être les coupables dans un roman policier ? Quelles combinaisons peuvent offrir mobiles et lieux ? Peut-on se fier au narrateur ? La justice triomphe-t-elle toujours ? Des personnages célèbres peuvent-ils se tromper ou disparaître ? Peut-on jouer avec et contre le lecteur ? Et bien d’autres questions encore... Considérés dans son ensemble, ses écrits forment un tout complet et complexe dont la logique systématique peut être rapprochée des travaux d’un « mouvement » comme l’OuLiPo.
Héritière assumée de l’univers d’Arthur Conan Doyle, elle partage avec ce mentor un nombre foisonnant d’adaptations de ses œuvres qui ont contribué à générer un univers esthétique très identifiable. Elle est de très loin l’auteur de polars le plus vendu dans le monde.
Christie a su marier à merveille exigences scénaristiques, innovations littéraires, univers iconique et plaisir de lecture. La reine du polar, c’est elle.
