- Réalisateur : Mike Flanagan
- Acteurs : Zach Gilford, Annabeth Gish , Kate Siegel, Hamish Linklater
Chantre de l’épouvante, le showrunner Mike Flanagan revient avec une série inquiétante et passionnée – trop sans doute cette fois. Voici 3 raisons d’y succomber, ou pas.
Deux destins s’enchâssent. Il y a d’un côté Riley Flynn, trentenaire qui vient de purger une peine de quatre ans de prison pour avoir provoqué malgré lui la mort d’une jeune fille alors qu’il conduisait en état d’ivresse. De l’autre, il y a celui du Père Paul Hill, jeune prêtre charismatique et mystérieux sorti de nulle part. Leurs trajectoires se croisent sur l’île de Crockett Island lorsque Riley retourne vivre dans la maison de ses parents. Une inimitié semble émerger entre les deux hommes, tandis que très vite, la centaine d’habitants du village de Crockett Island doit faire face à des événements miraculeux et à des présages inquiétants…
Après deux séries articulées autour de l’effroi et du paranormal ("The Haunting of Hill House" et "Bly Manor"), comme autant de signes du traumatisme latent de leurs protagonistes, le showrunner Mike Flanagan revient sur Netflix avec une série plus cérébrale et verbeuse que fondamentalement horrifique. Dans cette allégorie qui s’en prend à l’extrémisme religieux (avec une impétuosité parfois jubilatoire mais aussi avec une lenteur pontifiante), les sursauts se voient remplacés par une réflexion à la fois mystique et lyrique sur la croyance. Malgré une atmosphère gothique particulièrement réussie et travaillée (belle gestion de la lumière et de la photo, notamment), l’épouvante passe donc au second plan pour laisser place à des dialogues denses et prolixes, sorte de quête psychanalytique visant à passer la foi au crible. La tension psychologique et spirituelle – à la manière de "The Leftovers" mais en plus grandiloquent peut-être – s’installe en lieu et place des tressaillements habituels. Le rythme lancinant de la série, qui prend le temps de sonder ses personnages quitte à les surligner, aurait de quoi rebuter voire repousser totalement s’il n’était parfois contrebalancé par une dramaturgie intense et suffocante.
C’est peu dire que Mike Flanagan (qui réalise ici tout d’un bout à l’autre) se montre d’une ambition démesurée – trop, sans doute. Chacun des sept épisodes de sa mini-série reprend par exemple le nom des livres de la Bible. La petite île imaginaire où se déroule le récit, qui n’est pas sans rappeler la Nouvelle-Angleterre, prend rapidement des airs de parabole contemplative. La communauté de Crockett Island, résignée à finir incessamment engloutie par les eaux, ne se bouscule plus à l’église. Toutefois, les choses vont changer avec l’arrivée du Père Paul (excellent Hamish Linklater) et à la faveur de phénomènes énigmatiques, qui manquent d’ampleur malheureusement. Sous des dehors angoissants et a priori passionnants, "Sermons de minuit" finit par réciter sans subtilité toutes les péripéties classiques autour de la foi : le pardon, la rédemption et bien sûr le salut. Or, la tension psychologique se trouve de plus déséquilibrée par la lourdeur des discussions (sur l’ombre et la lumière, le Bien et le Mal, toujours…), quitte à sérieusement plomber l’harmonie générale. En découle un déroulement trop distendu et sans grande surprise, en dépit des quelques élans fantastiques séduisants (cadavres d’animaux, possible créature démoniaque…). Et plus dommageable encore : les personnages s’avèrent trop souvent réduits au rang de banal stéréotype, à l’instar de la scientifique, de la bigote ou encore du policier musulman. Dommage, car le casting était parfait et Flanagan avait déjà montré à plus d’un titre (surtout avec "Hill House" et "Jessie") qu’il est capable du meilleur.