- Réalisateur : Yves Boisset
- Acteurs : Michel Piccoli, Gérard Lanvin, Marie-France Pisier
- Nationalité : Français, Yougoslave
- Âge : Interdit aux moins de 12 ans
- Durée : 1h40min
Les pépites du polar !
Thriller d’anticipation et fable dystopique : le film de Boisset, plutôt mal reçu à sa sortie, figure aujourd’hui comme un avertissement symbolique sur les dérives de la société du spectacle.
Un peu moins de vingt ans avant que la télé-réalité ne débarque sur nos écrans français, avec Loft Story, Yves Boisset, franc-tireur engagé du cinéma gaulois, sortait Le prix du danger, un film d’anticipation adapté d’une nouvelle de Robert Sheckley, qui évoquait de manière volontairement outrancière les dérives de la société spectacle. Il ne faut évidemment pas prendre ce long métrage pour le reflet exact de ce que deviendrait la petite lucarne des années plus tard, puisque le meurtre n’y a heureusement pas été légalisé en tant que climax d’un programme grand public.
Il faut plutôt percer à jour les critiques sous-jacentes à cette fable dystopique, où Michel Piccoli incarne un présentateur visqueux et racoleur, prêt à feindre le sentimentalisme pour accrocher le spectateur, tout en lui vendant le dernier produit à la mode. Sa feinte bonhomie cache à peine l’excitation que lui procurent cinq tueurs lancés aux trousses d’un homme qui fuit comme une bête.
De son côté, Marie-France Pisier joue une directrice des programmes cynique et Bruno Crémer un président de chaîne implacablement fidèle à sa logique de rentabilité. Gérard Lanvin est le héros de cette implacable course-poursuite. Il interprète le personnage du candidat qui doit échapper par tous les moyens à ses poursuivants, pour décrocher le jackpot de l’émission : qu’il soit chômeur n’étonne pas, parce que dans cette société futuriste où l’argent s’avère la carburant des dominants comme des dominés, un pactole à remporter vaut bien qu’on mette sa peau en danger. D’où le titre de ce film sombre et prémonitoire, où les vies marchandisées sont des existences qu’on peut sacrifier. Même en trichant...
S’il n’évite pas certaines facilités, Le prix du danger, mal évalué à son époque, nous dit beaucoup sur nos sociétés néolibérales, où l’appât du gain justifie toutes les dérives. Sans dénigrer la performance de Lanvin, on imagine ce que Patrick Dewaere aurait pu faire d’un tel rôle qui lui était au départ dévolu, d’autant que le comédien venait de tourner un autre film d’anticipation, Paradis pour tous, assez proche du long métrage de Boisset par sa consistance métaphorique.