- Auteur : Philippe Godoc
- Editeur : VIVIANE HAMY
Pour son premier roman, Philippe Godoc a décidé de revenir sur le scandale du chlordécone en Guadeloupe où il vit...
Bepolar : Tout d’abord un petit mot sur vous. Kepone est votre premier roman. Qu’est-ce qui vous a amené à l’écriture et plus particulièrement au polar ?
Philippe Godoc : Je suis un lecteur de polars depuis des années, après une passion de jeunesse pour les œuvres d’anticipation. Kepone est mon premier roman publié. J’ai mon ordinateur plein de brouillons, d’idées et de plans, tous avortés. Comme beaucoup, c’est le temps mort imposé par le Covid qui m’a permis d’emmener Kepone jusqu’au bout.
Bepolar : Comment est né ce premier roman, Kepone ?
Philippe Godoc : Je vis aux Antilles depuis de nombreuses années. Le scandale du Chlordécone a marqué nos existences ces vingt dernières années avec régulièrement de nouvelles révélations. Cette histoire est un formidable révélateur de l’histoire de nos îles et de la confrontation persistante entre anciens colons et colonisés. En outre, mes activités professionnelles liées à l’environnement m’ont donné un regard particulier sur ces évènements.
Bepolar : Vous y parlez du scandale du chlordécone. Qu’est-ce qui vous a donné envie d’évoquer ce sujet ? Et pourquoi dans une fiction ?
Philippe Godoc : L’histoire officielle comporte de nombreux oublis et incohérences, je me suis amusé à en combler les trous. Kepone a aussi été l’occasion de se livrer à une critique de la société antillaise où le passé n’en finit pas de pervertir un présent qui peine à s’écrire. Le roman interroge le quotidien par le recul qu’il apporte.
Bepolar : On croise dans votre récit quelques hommes politiques et une situation sanitaire et sociale compliquée. Vous aviez en plus du thriller aussi envie de parler de la Guadeloupe ?
Philippe Godoc : La société antillaise est une loupe des travers de la société française qui ne parvient pas régler son passé colonial. J’ai essayé de montrer une autre facette de la Guadeloupe, bien éloignée des plages de sable blanc, du ti-puch et des doudous.
Bepolar : Votre personnage principal est un journaliste et non un policier. Pourquoi ce choix ? Vous aviez envie qu’il ait plus de liberté d’agir ?
Philippe Godoc : Un policier est enfermé dans une fonction codifiée et une hierarchie. Le personnage de Marc, journaliste métis, ni vraiment guadeloupéen ni tout à fait métropolitain, est le plus à même à porter un regard indépendant sur ces évènements, débarrassé des préjugés propres à chacune des communautés. Les évènements le plongent dans un monde dont il ignorait les tensions, où la vérité est mouvante et le poids de l’histoire toujours présent.
Bepolar : Qu’est-ce que vous aimeriez que vos lecteurs et lectrices retiennent une fois la dernière page tournée ?
Philippe Godoc : Je ne me suis jamais posée cette question ! S’ils ont passé un bon moment, ce serait déjà pas mal. Peut-être aussi que la vérité n’est pas universelle. Chacun y puise une part qu’il utilise à ses fins.
Bepolar : Est-ce que vous avez un nouveau roman en cours d’écriture ? Sur quoi travaillez-vous ?
Philippe Godoc : L’histoire du canal de Panama est peu connue. Savez-vous par exemple qu’il a été creusé par des antillais à peine sortis de l’esclavage et qu’il a fait des milliers de morts ? Le percement du canal a été une formidable aventure technologique qui mélange affairisme, héroïsme, misère, racisme, élites déconnectées, révolution... A partir de cette histoire, je mélange de vrais héros, salauds ou escrocs à des personnages de fiction. J’aimerais aussi (un jour) remettre en selle Marc pour de nouvelles aventures. Je me suis attaché à ce mec !
Photo de Philippe Godoc par Mariane Aimar, Copyright : Flammarion