The Covenant
De : Guy Ritchie
Avec : Jake Gyllenhaal, Dar Salim, Emily Beecham, Antony Starr
Genre : action, thriller, drame
Pays : Angleterre, Espagne, États-Unis

Pour sa dernière mission en Afghanistan, le sergent John Kinley fait équipe avec un nouvel interprète, Ahmed, afin d’arpenter la région et débusquer une escouade de talibans. Mais leur groupe se retrouve en pleine embuscade lors d’une patrouille, piège inextricable dont Kinley et Ahmed apparaissent comme les seuls survivants. Alors que des combattants ennemis les traquent sans relâche, Ahmed et John tentent de se frayer un chemin au sein d’un territoire hostile et cahoteux…

Guy Ritchie a depuis longtemps troqué sa facétie mordante - celle d’"Arnaques, Crimes et Botaniques" (1998) et "Snatch" (2000) - contre une orientation plus tapageuse et poseuse. Si un semblant de la fougue d’antan du britannique tente quelquefois de remonter à la surface, la contrefaçon apparaît patente. À tel point que son cinéma, non dépourvu certes parfois d’impétuosité (en témoignent ses "Sherlock Holmes" virevoltants – 2009 puis 2011 –, blockbusters atypiques), a fini par tourner à la formule sinon à la gravité balourde. C’est que quelque chose de ronflant et de grandiloquent régit désormais la plupart de ses longs-métrages. Ainsi, "Un homme en colère" (2021) lorgnait sévèrement du côté du film d’action premier degré, plaçant Jason Satatham au bord de l’auto-parodie. Or, bien que "The Covenant" n’échappe pas à ces inclinations de Ritchie pour la prétention, cette œuvre moins inflexible et nourrie par le jeu irrésistible de Jake Gyllenhaal s’avère (un temps) plus séduisante que ses récents aînés.

En partie tiré de faits réels survenus en 2018 en marge de la guerre lasse des Américains contre les Talibans en Afghanistan, "The Covenant" s’attache davantage à ses personnages et à leurs trajectoires qu’il ne cherche à soumettre un point de vue sur le conflit. Même si une critique latente des choix des hauts gradés de l’armée américaine affleure timidement - redoublée par l’emprise des Talibans aujourd’hui redevenue incontournable en Afganistan -, Ritchie privilégie sur le réel largement l’expérience et la tension ressentie par le spectateur. Plusieurs genres s’immiscent dans le film : le film de guerre bien sûr, mais aussi très vite l’action, le thriller, voire le survival. Toute la première moitié de "The Covenant" ressemble à un film de survie mâtiné de buddy movie. Le sergent John Kinkey (Jake Gyllenhaal) et son interprète Ahmed (brillant Dar Salim) forment ainsi un duo aussi inconciliable que foudroyant d’efficacité. Sans jamais atteindre par exemple la virtuosité de metteurs en scène comme Kathryn Bigelow, qui a excellé en matière de guerre ("Démineurs" et "Zero Dark Thirty"), Guy Ritchie signe alors quelques scènes assez remarquables et bien interprétées.

Quel dommage, lorsque le film revisite les instants périlleux passés ensemble par John et Ahmed, que "The Covenant" cède si inutilement au sentimentalisme. Ployant sous les visions en flashback larmoyantes de John et sous un cortège de musiques trop tonitruantes et peu subtiles, le film se délite ensuite (sans non plus s’effondrer complètement) au profit d’un mélo agaçant. Compte tenu de leur jeu exceptionnel capable de traduire en sensations jusqu’aux détails les plus incommunicables, Jake Gyllenhaal et Dar Salim se suffisaient à eux-mêmes. Le scénario n’avait pas besoin de s’embarrasser de la même rengaine ou d’un sous-texte pour expliciter des éléments transparents par essence.

Reste malgré la faiblesse du sous-texte politique et une nette tendance à la sensiblerie feinte, un film convenable dans l’ensemble. Les témoignages de vétérans recueillis par Ritchie pour écrire son film se sentent notamment du côté de John Kinley, tiraillé entre sa vie de soldat et sa famille. Mais le caractère lourdement héroïque de la deuxième moitié du film aurait mérité des coupes pour que "The Covenant" évite les longueurs et, quelquefois, la niaiserie.

"The Covenant" est disponible sur Amazon Prime depuis le 23 juin 2023.