- Auteur : S.K. Tremayne
- Editeur : Presses de la Cité
- EAN : 9782258138407
Tu vas mourir à Noël
Il y a quelques jours, l’auteur anglais S.K. Tremayne était de passage à Paris pour présenter son nouveau roman, La Menace aux éditions Presse de la cité. Nous avons pu assister à une rencontre avec des libraires. Rien que pour vous, voici la restranscription des échanges... Il y parle d’île en Ecosse, de famille et de deux petites filles presque jumelles...
(Présentation de son éditrice, Frédérique Polet, qui a ensuite posé les questions)
S.K. Tremayne a fait des romans historiques dans le style du Da Vinci Code avant d’avoir envie de changer de genre et de prendre un pseudonyme comme ça se fait beaucoup aux Etats Unis. Il a alors décidé de jouer sur l’ambigüité de son nom pour laisser aux lecteurs le soin de deviner s’il était un homme ou une femme. D’ailleurs un des libraires tout à l’heure s’est trompé. Il pensait rencontrer une femme (rire). Comme quoi ça marche.
C’est un auteur pour qui le lieu de chaque récit est très important et tous ses romans ont un lien très fort avec sa propre histoire personnelle. Le dernier par exemple se passe en Cornouailles où il est né. Il a appris il y a peu de temps que sa grand mère a travaillé à huit ans dans les mines de Cornouailles et que ça l’a tué à 48 ans. C’est l’idée première de son roman La Menace. Et puis il voulait écrire également sur une famille prête à exploser et sur la prémonition...
S.K.Tremayne : Je ne crois pas vraiment aux prémonitions, à cette idée de deviner l’avenir. Mais je suis tombé sur un tableau datant de 1937 qui s’appelle Prémonition et qui montre Londres sous les bombes. Evidemment, certains disent qu’à cette période, les nazis étaient déjà au pouvoir et qu’ils avaient mené des bombardements en Espagne. Mais nous avons eu à Londres des attaques terroristes le 7 juillet 2015, avec une bombe qui a explosé dans le bus numéro 30. Or dans le tableau, il y a deux bus qui explosent dont un porte le numéro 30. Et le deuxième est le 77, dont les deux chiffres sont séparés par un point. Comme 7/7, la date de l’attentat. Je ne crois pas à la capacité de prévoir le futur mais la coïncidence m’a frappé. J’étais alors en train de travaille sur La Menace et je me suis demandé comment vivre avec une prémonition.
La phrase prémonitoire c’est “Tu vas mourir à Noël”. Pourquoi justement ?
S.K.Tremayne : Parce que je déteste Noël (rire). Ma famille est un désastre. J’ai trois belles mères, tout le monde est divorcé, j’ai appris l’existence d’un demi-frère il y a un an... Noël était toujours un moment affreux chez moi avec plein de rancunes qui remontaient sous l’effet de l’alcool. Et puis le lendemain est férié en Angleterre. Ca fait donc deux jours à se retrouver enfermé en famille. Une année, ma deuxième belle mère a tenté de me poignarder. Mais comme elle avait trop bu, elle m’a loupé (rire). Ma haine de Noël a nourri le livre. Même si maintenant je suis père de famille, donc j’aime un peu plus cette fête...
C’est une sorte d’hommage à Rebecca de Daphné du Maurier. Avec la Menace, S.K.Tremayne fait une sorte de métaphore du cauchemar de la vie familiale.
S.K.Tremayne : L’ile écossaise qui est dans Le Doute existe vraiment. Elle appartient à un ami à moi. C’est un endroit à la fois terrifiant et magnifique, complètement coupé du monde, le lieu idéal pour un décor de roman. Alors que j’en parlais à des proches, leur disant que je voulais faire une histoire sur cette ile avec une famille qui aurait perdu un enfant et qui serait dans le deuil, la douleur et la culpabilité, une de mes amies a suggéré qu’il y ait des jumeaux. J’ai trouvé son idée géniale. Le lien entre eux est si fort. La mort d’un jumeau est très traumatisante pour celui qui reste. Les parents sont parfois obligés de supprimer les miroirs ou les petites cuillères par que sinon, leur enfant lorsqu’il se voit, à l’impression de voir un fantôme...
Il m’a fallu presque 200 pages avant que je ne me rende compte que j’étais en train d’écrire à propos de ma propre vie. En fait j’ai deux filles qui ont toutes les deux dix ans mais qui ne sont pas des jumelles. Elles ont dix jours d’écart et des mères différentes. C’était une année intense (rire). J’étais à Madgascar en train de regarder mes mails (dans un endroit incroyable pour regarder ses mails) lorsque j’ai reçu deux messages de deux femmes différentes me disant qu’elles étaient enceintes. Une vit en Australie et l’autre en Angleterre et elles ne se sont rencontrées que cette année. J’ai compris que cette idée de jumeau fantôme sur laquelle j’écrivais était sans doute ce qu’avait dû ressentir mes filles qui connaissaient leur existence réciproque mais sans jamais s’être vu. C’est sans doute ce qui explique le succès du livre. Il a été crée par une part de moi, de ma culpabilité et de ma folie...
Mais la fin est heureuse. Elles se sont donc rencontrées pour la première fois l’année dernière. Et elles se ressemblent...
Que veut dire le “k” de “S.K. Tremayne” ?
S.K.Tremayne : J’en sais rien (rire). Tremayne est le nom de jeune fille de ma grand mère.
Quand vous écrivez, vous connaissez déjà la fin ou vous vous laissez porter ?
S.K.Tremayne : Normalement j’ai un plan très précis d’une vingtaine de pages, mais ça peut changer. Dans mon premier livre, je n’ai pas exemple trouvé la fin que le dernier jour de l’écriture.
Bepolar remercie chaleureusement Julien Guerry, libraire à Gibert Joseph, pour avoir enregistré cet entretien...