Bepolar : Comment est née l’idée de ce roman ?
Marine Béliard : J’ai toujours été fascinée par la vie hors normes de certains groupes de musique. Cela m’a donné très envie de créer une intrigue autour d’un groupe de rock, depuis les débuts jusqu’à la célébrité, avec les joies du succès mais également la pression et les excès qui l’accompagnent.
Avec cette idée de faire vivre le groupe du roman, « A queen in New York », comme s’il avait réellement existé. Pour ce faire, j’ai notamment imaginé de fausses interviews dans le magazine américain Rolling Stone, et j’ai collaboré avec l’artiste Annika and The Forest qui a créé quatre titres spécialement pour le livre, avec la complicité des musiciens David Aknin (batteur) et Victor Paimblanc (bassiste). Ces quatre morceaux correspondent à des moments différents de la vie du groupe et parlent de ce que les personnages vivent à l’époque. On peut les écouter via un QR code présent à la fin du livre.
Bepolar : Qu’est-ce qui vous a donné envie de replonger dans le New York des années 80 ?
Marine Béliard : Je suis fan de nombreux groupes, de chanteuses et chanteurs des 70’, 80’. David Bowie, Patti Smith, Lou Reed, Iggy Pop pour ne citer qu’eux… J’avais envie de faire un voyage dans le temps et d’emmener les lecteurs avec moi.
J’ai choisi NYC car c’est un lieu phare de cette créativité musicale à l’époque, un véritable creuset d’artistes très différents, et puis NYC a un contexte social et économique très particulier durant ces années-là : c’est une ville dangereuse, avec un taux de criminalité record, et en pleine crise sociale et financière.
Cette créativité artistique qui émerge au milieu de ce chaos est très fascinante.
J’ai en tête cette phrase de Patti Smith qui revient sur ces premières années à New York : (…) dans cette ambiance de confusion et de crasse, ici j’ai trouvé un monde féérique en moi (…).
Ces mots expriment parfaitement combien cette ville l’a inspirée et l’a révélée en tant qu’artiste.
Je suis également une inconditionnelle des films de l’époque, comme Taxi Driver, Serpico, Cruising entre autres…
Bepolar : On suit l’enquête d’une chanteuse, Elva, membre du groupe A Queen in New York. Joe, un ancien flic s’empare du dossier. D’autant qu’il est sur la liste des suspects. Qui est-il ?
Marine Béliard : Joe est un personnage complexe, plein de fêlures qui datent de l’enfance, avec cette soif de justice qui l’amène d’ailleurs à devenir policier. Mais les conditions de travail de la police à New York sont très difficiles dans les 70’. Joe va vivre cela de plein fouet, et il va finir par craquer. Il quitte la police et se retrouve détective privé. Lorsque Elva décède, il n’accepte pas sa mort, et surtout ne croit ni au suicide ni à une overdose accidentelle. Il va alors se lancer dans une enquête intime, et remonter le temps pour tenter de comprendre ce qui s’est passé. Ceci va évidemment le bouleverser et le plonger au plus profond de ses émotions et sentiments.
Bepolar : Comment vous êtes-vous replonger dans cette période ? Il y a eu beaucoup de documentation ?
Marine Béliard : J’ai voulu recréer l’ambiance de New York à l’époque, et faire revivre tous ces lieux mythiques, et même certains moins connus. J’ai effectué un long travail de documentation, je souhaitais que les scènes se déroulent dans des lieux qui ont vraiment existé.
J’ai lu de nombreux livres se déroulant à NYC à l’époque, des biographies d’artistes, et internet a été un outil formidable pour retrouver des témoignages, des photos de la ville et des lieux où se déroule l’intrigue.
J’ai également échangé avec des personnes ayant vécu à NYC durant ces années-là. J’ai notamment eu la chance de m’entretenir avec Alain Bizos (qui a participé à la création du quotidien Libération, et qui est également l’un des fondateurs du magazine mensuel Actuel et de l’agence de photographes Vu’). Dans les années 70, Alain était l’assistant de l’artiste Arman à New York et a fréquenté le milieu artistique. Il a eu la générosité de me confier de nombreuses anecdotes sur les personnalités qu’il a côtoyées à l’époque, sur les soirées, et les lieux.
Bepolar : On croise Andy Warhol et Léonard Cohen, on écoute Jimi Hendrix, Blondie, Lou Reed et David Bowie...Vous aviez envie d’une sorte de photo de cette époque américaine avec le rock, la libération sexuelle et la contre-culture underground ? Et la drogue aussi...
Marine Béliard : Oui tout à fait. Cette époque révolue est absolument incroyable et unique, elle a fait rêver de nombreuses générations et continue d’être une source d’inspiration. J’ai souhaité lui redonner vie à travers ce roman.
Bepolar : Comment avez-vous tissé votre intrigue ?
Marine Béliard : J’ai commencé par écrire certaines scènes avec Elva, et les interviews dans le magazine Rolling Stone... Très rapidement, la mort d’Elva s’est imposée à mon esprit comme le déclencheur de l’intrigue et le point de départ de cette enquête sur plusieurs décennies.
J’ai eu envie de créer un personnage de policier, tout en ambiguïtés, à la fois fort, avide de justice, mais avec des blessures intimes et une fragilité, qui vont finir par le rattraper. J’avais en tête l’acteur Joaquin Phoenix dans certains de ses films (je pense par exemple à La nuit nous appartient). J’ai fait aussi des recherches sur les policiers new-yorkais dans les années 70 et les conditions difficiles dans lesquelles ils travaillaient.
Les révélations et rebondissements de l’histoire sont venus assez naturellement au fil de l’écriture et de l’évolution des personnages.
Bepolar : Qu’est-ce que vous aimeriez que les lecteurs et lectrices gardent en eux une fois la dernière page tournée ?
Marine Béliard : La sensation d’avoir remonté le temps avec les personnages, d’avoir vibré à leurs côtés et d’avoir ressenti l’ambiance électrique et démente de New York à l’époque.
Bepolar : Quels sont vos projets ? Sur quoi travaillez-vous ?
Marine Béliard : Je réfléchis à mon prochain roman, j’en suis aux prémices, il s’agira d’un roman psychologique avec une enquête personnelle.
Bepolar : Qu’est-ce qui fait un bon polar ?
Marine Béliard : J’adore les polars psychologiques, qui tiennent le lecteur en haleine et vont le surprendre au fur et à mesure de l’intrigue, jusqu’au dénouement. Je citerais volontiers Shutter Island, l’un de mes romans favoris.