- R�alisateur : Eric Newman
- Acteurs : Vanessa Ferlito, Sofia Vergara
Sans renouveler outre-mesure le principe du biopic mafieux tout en restant dotée d’une ambiance réussie, "Griselda" s’en tire plutôt bien. Quitte même à tenir le spectateur en haleine en dépit de ses raccourcis et de son impersonnalité…
Griselda
De : Eric Newman
Avec : Sofia Vergara, Alberto Guerra, Vanessa Ferlito
Genre : thriller, biopic, drame
Année : 2023
De ses débuts tourmentés à sa chute infernale en passant par son règne implacable sur le trafic de cocaïne, "Griselda" suit l’ascension épineuse de la baronne de la drogue Griselda Blanco. Sur fond de paranoïa et de trahison, se déploie un parcours semé d’embûches et de morts…
Si chacun se représente Pablo Escobar – devenue une icône de la pop-culture – et sa mainmise impitoyable sur le trafic de cocaïne dans les années 1980 et 1990, notamment au sein du cartel de Medellin, il en va autrement de la trajectoire de la redoutable narcotrafiquante Griselda Blanco. Elle qui fut jadis le mentor du célèbre baron de la drogue susnommé laissa pourtant une empreinte aussi indélébile que macabre en Colombie. Pas étonnant, donc, que cette figure plus confidentielle fasse désormais l’objet d’une série (après avoir donné lieu à un long-métrage avec Catherine Zeta Jones en 2017). D’autant que le personnage, surnommée la « Reine de la coca », la « veuve noire » ou encore « la marraine » fit office de pionnière en matière de trafic de cocaïne dans les années 1970 à Miami. C’est cette emprise funeste que tente de capturer "Griselda", entre ascension vertigineuse et descente aux Enfers irrépressible, à la façon d’un "Scarface" (Brian De Palma, 1983), la virtuosité en moins.
Aux manettes de cette série Netflix dont on connaît plus ou moins d’avance les classiques péripéties, on retrouve l’équipe de "Narcos" (Eric Newman et Andres Baiz) et Sofia Vergara ("Modern Family"), laquelle campe ici le rôle-titre. Au gré d’une mise en scène relativement virevoltante, quelque part sur le modèle du Martin Scorsese des "Affranchis" et du Brian De Palma de "L’Impasse" – la subtilité en moins –, la mini-série se révèle ambitieuse. Rythme, montage, galerie de personnages… ce biopic très romancé ne joue pas tout à fait autant la carte du formatage Netflix qu’on aurait pu l’imaginer. Si le spectacle prime sans surprise largement sur l’authenticité et l’originalité, l’écriture s’avère néanmoins en général d’assez bonne facture. Il ne faut certes pas s’attendre à un portrait très nuancé, Sofia Vergara apparaissant souvent beaucoup trop sculpturale pour feindre une quelconque véracité dans la peau de Griselda Blanco. De fait, "Griselda" privilégie le fantasme et manque de variété dans ses tonalités. Au point que le récit finit un peu par s’essouffler à force de clichés. Pour autant, la série se laisse dévorer sans réel déplaisir.
La réalisation maîtrisée, la colorimétrie vintage seventies/eighties et les divers rebondissements - par-delà la morale et aux prises d’une violence évidente – font vite oublier le manque de caractère et d’audace de "Griselda". Mais n’était-ce pas là au fond ce qui constituait déjà les qualités et défauts de la série "Narcos" - beaucoup plus poseuse que profonde – ? Sans jamais atteindre bien entendu la moite répulsion d’un "Scarface", œuvre aussi détestable que brillante, la série "Griselda" n’en distille pas moins une atmosphère quelquefois anxiogène et régulièrement chaotique. Qu’importe alors sa flamboyance en berne, son cheminement cousu de fils blancs, ses protagonistes trop sensuels et caricaturaux, car le divertissement réussit ingénument à prendre le pas sur le réel. Ainsi, la fiction l’emporte dans sa dimension récréative, balayant tout jusqu’aux sempiternels stéréotypes dépeignant exclusivement la Colombie au travers de la corruption, de la drogue et de la sauvagerie.
La série "Griselda" est disponible sur Netflix.