- Réalisateurs : Joaquín Górriz - Guillermo López Sánchez
- Acteurs : Amaia Aberasturi, Tomy Aguilera, Diego Garisa
Haletante et standardisée, la série espagnole “Bienvenidos a Eden” s’approprie tous les stéréotypes imaginables pour divertir. Faut-il regarder cette énième série Netflix espagnole axée thriller et mystère ?
Prenez un groupe de jeunes incarnant sans finesse, à travers leurs caractères et typologies, quelques-uns des grands archétypes. Propulsez-les dans une soirée sélecte sur une île lointaine et paradisiaque - l’Eden qui donne son titre à la série. Transformez petit à petit ou brusquement ce petit paradis en véritable enfer pétri d’incertitudes. Faites en sorte que toute cette bande d’idéalistes se retrouve piégée et sans aucune échappatoire envisageable, avec à la clé des morts brutales et énigmatiques. Vous obtenez “Bienvenidos a Eden”, une série à la fois totalement stéréotypée, conventionnelle à outrance, et néanmoins quelquefois dans une certaine mesure irrésistible.
Nombreuses sont les séries espagnoles Netflix à bénéficier d’une production plutôt luxueuse et surfant sur le thriller ou le suspense. Il en va ainsi de “La Casa de Papel” ou encore de “Qui a tué Sara ?”, pour ne citer que quelques-unes des plus populaires. “Bienvenidos a Eden” se classe donc dans cette catégorie. La logique de la série se veut identique aux comparses précitées : établir le récit le plus ordinaire et accrocheur pour toucher le plus de spectateurs, sans singularité mais avec une certaine générosité. On ne vient pas là pour en prendre plein la vue, encore moins pour réfléchir ou pour découvrir une avant-garde, mais simplement pour se divertir.
Fidèle à tous ces cahiers des charges Netflix préférant nettement la logique marketing à la spontanéité ou à une quelconque originalité (coucou “La Casa de Papel”), “Bienvenidos a Eden” coche donc toutes les cases de la standardisation. De quoi ne jamais laisser de place au hasard. Presque invisible, la mise en scène de la série privilégie ainsi l’épure tape-à-l’œil pour coller au maximum au dispositif qui produit et suscite quelques-uns des nombreux succès populaires de Netflix. Tout semble affaire de calcul. Le spectateur évolue de fait dans un univers balisé, codifié, rassurant et vu des milliers de fois. Un cocktail qui fait une fois n’est pas coutume mouche, du moins en matière d’audience, puisque “Bienvenidos a Eden” s’est avéré un ticket gagnant pour le géant de la vidéo à la demande.
Abstraction faite de cette normalisation excessive et de sa production trop millimétrée voire suffocante, “Bienvenidos a Eden” bénéficie d’un cadre assez enchanteur. Quelques-uns de ses rebondissements réussissent à sortir du lot, de même que certains personnages légèrement plus attrayants que les autres. L’idée du paradoxe entre l’île paradisiaque et la communauté en autarcie sectaire fonctionne, ou presque si l’on oublie la mash-up raté entre “Ils étaient dix” d’Agatha Christie et “La Plage” de Danny Boyle.
Reste l’un des principaux écueils de “Bienvenidos a Eden” : la mise en place de son intrigue, beaucoup trop longue et bancale. L’ouverture de la série s’avère en effet interminable et maladroitement axée teen movie, entre mystère et érotisme. En outre, les antagonistes sont très mal écrits, beaucoup trop caricaturaux et à la cruauté franchement gratuite. Résultat, on résiste à l’envie d’interrompre “Bienvenidos a Eden” avant la fin grâce à ses twists et décors - l’île de Lanzarote, principal protagoniste secondaire, y est pour quelque chose. Mais on oublie très vite cette expérience des plus ordinaires.
La série “Bienvenidos a Eden” est disponible sur Netflix.