- Acteurs : Danica Curcic, Mikkel Boe Folsgaard, Esben Dalgaard Andersen
Avec son récit magistral et son tueur en série implacable, la série danoise "Octobre" se révèle aussi passionnante que terrifiante. Une chasse à l’homme automnale signée Søren Sveistrup et diffusée par Netflix.
Deux policiers de Copenhague que tout sépare doivent enquêter sur une série de meurtres sordides. Le dénominateur commun de ces crimes est une figurine enfantine bricolée avec des marrons, chaque fois placée à quelques pas du corps…
Une intrigue criminelle ancrée à Copenhague, un duo de policiers inconciliables aux trousses d’un tueur machiavélique, le tout articulé sur fond d’enjeux politiques… les aficionados de "The Killing" – série danoise culte de 2007 qui a donné lieu à un remake américain – ne seront pas dépaysés tant les deux œuvres rivalisent a priori de points communs. Le rapprochement n’est pas un hasard, évidemment : les deux séries ont chacune été créées par le scénariste et écrivain Søren Sveistrup, et cela se sent. Reste que l’histoire avance cette fois beaucoup plus vite que dans "The Killing". Car "Octobre" surfe sur le format en vogue des mini-séries, ramassant son scénario sur seulement 6 épisodes. Un format qui lui confère une réelle intensité et lui offre de nombreux twists.
Là où "The Killing" prenait amplement le temps de délayer ses personnages pour bien cerner les raisons et les choix de chacun d’entre eux, "Octobre" va droit au but avec son manège haletant. Sans effacer complètement la dimension psychologique, la nouvelle série de Søren Sveistrup insiste avant tout sur l’atmosphère et les péripéties multiples. Plus qu’un polar, la série se déploie ainsi comme un thriller, avec ce que cela implique d’angoisse et de tension – la terreur n’est pas loin, sur le mode du slasher. Le corps de la victime (ici des) n’est plus, comme dans "The Kiiling", cette sorte de « Laura Palmer » qui planerait au-dessus de chacun en guise de toile de fond et agirait plus comme un prétexte que comme enjeu essentiel. Là, la chair fait partie intégrante de l’énigme à résoudre, chaque morceau de corps constituant un jeu de pistes macabre.
Mais le principal atout d’"Octobre", c’est – comme son titre l’indique – son ancrage automnal. À l’image d’une présence perfide qui surplomberait tel un démiurge tous les actes horribles de la série, les arbres rougeoyants de l’automne donnent toute leur âme inquiétante aux épisodes. Même si chaque rebondissement ou événement relève ici toujours du tangible et du palpable (nous ne sommes bien sûr pas dans "Phénomènes", de Shyamalan), une sensation oppressante quasi paranormale domine de nombreuses séquences – notamment lorsque les détectives découvrent un cadavre ou sont sur le point de mettre en évidence un élément crucial de l’enquête. Ainsi présent jusque dans la beauté mortifère de l’automne, le tueur – croquemitaine glaçant – guette, laissant planer sur le destin de chaque protagoniste une ombre funeste. La sensation est d’autant plus diabolique et effrayante qu’elle se double d’une histoire aussi alambiquée qu’extraordinairement cohérente – Sveistrup semble à la fois fasciné par le thème de l’incommunicabilité et des enfances/vies gâchées. Du suspense à la fois intelligent et pervers comme on en voit (trop) peu. Il s’agit de l’adaptation du premier roman (noir) de Søren Sveistrup himself (déjà paru en France chez Albin Michel).