- Auteur : Maxime Girardeau
Maxime Girardeau vient de signer l’intrigant polar Persona, dans lequel les victimes ne meurent pas mais sont enfermées en elles-même...
Bepolar : Comment est née l’idée de ce roman, dans lequel les victimes ne sont
pas tuées, mais torturées et enfermées en elles-même ?
Maxime Girardeau : L’embryon de Persona est né d’une idée et d’une angoisse. L’idée, d’abord, était d’incarner l’affrontement entre l’ancien et le nouveau monde que l’on voit tout autour de nous quotidiennement, au travers les codes du genre et plus particulièrement du thriller. L’angoisse, ensuite, m’est très personnelle. Il m’a toujours paru que les sévices corporelles provoquant des infirmités permanentes, étaient en soi pire que la mort elle-même. Cette volonté d’avoir des victimes "enfermées en elle-même" est donc apparue dès les premières réflexions sur Persona. Et puis, une personne de ma famille, suite à un accident vasculaire cérébral est resté "bloqué en lui-même" de longues années. Ça m’a certainement marqué plus que je veux bien l’admettre.
Bepolar : Franck Sommerset, commissaire à la Crim’, comment pourriez-vous nous le présenter ?
Maxime Girardeau :C’est un homme bienveillant qui entame les dernières années de sa carrière. C’est un flic brillant, doté d’une profonde acuité émotionnelle et qui a fait le choix très tôt de ne jamais quitter le terrain, de ne jamais profiter de ses succès pour gravir les échelons. C’est aussi un solitaire en dehors de la Crim’. Il s’est construit une famille à travers son équipe et se passionne depuis toujours pour la ville de Paris. J’ai construit Franck à partir de figures cinématographiques et plus précisément autour du personnage de Morgan Freeman dans Seven et celui de Peter Falk dans Columbo. Ils incarnent une forme de flic cérébral et sympathique. J’avais besoin de lui pour contre-balancer la froideur de l’univers des GAFAM que je décris en détails.
Bepolar : Certaines scènes sont difficiles à lire, notamment les scènes de crimes. Est-ce que c’est difficile à écrire ?
Maxime Girardeau :J’écris ce que je visualise. Plus c’est clair et détaillé dans mon esprit, plus c’est simple à retranscrire sur le papier. Les séquences violentes me hantaient telles des cauchemars, bien avant que je les rédige. Ce fut donc, parmi les scènes les plus intuitives à construire. En revanche, le dosage fut un travail de plus longue haleine. Mon éditrice m’a beaucoup aidé à définir la limite entre la violence graphique qui sert le récit et celle qui dégoûte le lecteur. C’est une alchimie difficile à atteindre, subjective, mais je suis heureux du résultat.
Bepolar : Vous y tisser une intrigue dans laquelle le web et ses dirigeants ont une place importante. Pour quelle raison ? Qu’aviez-vous envie de dire ?
Maxime Girardeau :J’ai ancré mon intrigue dans le milieu que je connaissais le mieux. J’ai travaillé dix ans pour des multinationales américaines du digital et notamment l’une qui forme l’acronyme GAFAM. J’avais envie de décrire ce que j’en ai vu et toute l’ambivalence qu’elles provoquent. Ce sont de fantastiques cadres de travail et leur puissance est grisante. Mais ce sont aussi des lieux de féroces compétitions où les rivalités sont constantes, éreintantes. La violence y est feutrée, mais pas moins rugueuse. C’est cette dualité que j’ai voulu décrire et utiliser comme toile de fond pour Persona.
Bepolar : Vous y parlez aussi des Persona, ce qui n’est pas nous mais ce que l’on pense que l’on est nous même. C’est ce à quoi vous fait pensez la vie numérique ?
Maxime Girardeau :Oui c’est exactement l’idée. Les Persona, littéralement le masque en latin, rassemblent cette notion que nous portons tous un masque face à l’autre, consciemment et inconsciemment. Nous voulons projeter de nous une image, où nous gommons des aspects de notre personnalité. Nous le faisons tous, sans exception. Les réseaux sociaux amplifient ce réflexe et les algorithmes nous renforcent dans l’exposition d’une version alternative de nous-même. L’influence des filtres Snapchat sur les plus jeunes en est un des marqueurs actuels
Bepolar : C’est votre premier roman, qu’est-ce qui vous a donné envie d’écrire ?
Maxime Girardeau :Un livre déjà, ALEX de Pierre Lemaitre, et un besoin de revenir à quelque chose de simple, écrire. Sortir pour un temps, du digital, du marketing, des grosses entreprises, de tout ce qui a constitué mon quotidien pendant une décennie. Je voulais retourner à ce que je faisais quand j’étais plus jeune.
Bepolar : J’imagine que vous avez déjà l’idée d’un prochain roman en tête. Sur
quoi travaillez vous actuellement ?
Maxime Girardeau :Je travaille en effet sur un autre roman, qui paraîtra également chez Fayard/Mazarine. Nous suivrons à nouveau Franck, Elga ainsi que d’autres personnages, nouveaux et anciens.
Bepolar : Quelles sont vos prochaines dates de dédicaces ?
Maxime Girardeau :Je peux d’ores et déjà vous confirmer que je participerai au salon Rosny Soit Qui Mal Y Pense 4, à la Fnac Rosny 2, le 16 mai, ainsi qu’au salon du livre de Saint Omer, le 10 et 11 octobre. D’autres dates se préparent, mais pour l’instant je ne peux pas vous les confirmer.