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L’interrogatoire d’Ophélie Cohen

Bepolar : Comment est née l’histoire de ce nouveau roman ?
Ophélie Cohen : Je regardais le journal télévisé, chez mes parents. Le présentateur parlait de l’affaire de Patrick Poivre D’Arvor et une étrange connexion s’est faite dans mon cerveau. S’il y avait bien eu des films sur les brigades de protection de la famille et des reportages aussi, il n’y avait jamais eu de roman noir, à ma connaissance, qui traitait de l’aliénation parentale et de l’instrumentalisation des services de police et de justice. C’est de cette étrange connexion qu’est née l’idée de ce roman. Ayant exercé en brigade des mineurs, à Chartres, j’avais le terreau pour construire une histoire qui permettrait de dénoncer certains faits et, en parallèle, de rendre hommage à ces services que l’on connait assez peu. Ces brigades gèrent de l’humain et exercer en leur sein laisse des traces.

Bepolar : On plonge en plein divorce, avec un couple qui se déchire. Vous aviez
envie de parler d’un moment de crise, dans lequel l’unité familial vole en éclat, mais aussi d’emprise et de manipulation ?

Ophélie Cohen : C’est exactement ça. La complexité des sentiments humains peut mener à des drames, y compris au sein de la famille. À l’époque de mes parents et plus encore de mes grands-parents, le divorce était quelque chose d’assez marginal. Les couples se battaient sans doute un peu plus qu’aujourd’hui pour maintenir une unité familiale, parfois à tort, acceptant d’embrasser le malheur à vie, ou encore parce qu’ils n’avaient pas d’autre choix (dépendance financière entre autres). Et puis c’était un sujet plus tabou. Pour autant, la grande majorité de ces couples faisait des compromis, sans doute plus d’efforts aussi, pour maintenir les foyers. J’ai le sentiment que ce n’est plus le cas aujourd’hui. On se bat moins, on fait moins d’efforts et le divorce s’est démocratisé. Dans ces crises familiales, les premières victimes sont les enfants. Quand les séparations se passent bien, en bonne intelligence, le trauma est moindre. Il n’est pas inexistant, mais le nouvel équilibre créé par les parents permet d’en diminuer les effets. A contrario, quand un couple se déchire, quand l’un des deux parents, voir les deux, prennent le(s) enfant(s) en otage(s), les dégâts psychologiques mais aussi l’impact négatif sur la construction de ces enfants, peuvent être dévastateurs. J’ai été le témoin de ce qu’on appelle « l’aliénation parentale », de ses conséquences, et c’est un fléau que je tenais à faire connaître.
J’avais aussi envie de travailler en profondeur l’aspect psychologique de mes personnages, de décrire le processus et enfin, de rappeler qu’en tant que parents notre premier devoir est de protéger nos enfants.

Bepolar : Ce déchirement est assez terrible et bouleversant à lire. Est-ce que
ça a été dur à écrire ?

Ophélie Cohen : Très oui. Écrire et décrire des émotions, avec les tripes, c’est très éprouvant. Pour ma part, mettre en mots des sentiments et des ressentis aussi forts, c’est la garantie d’en ressortir en larmes et épuisée. Et en même temps j’en ai besoin. Je suis persuadée que si je ne ressens pas ce que j’écris, je ne peux pas le transmettre.

Bepolar : Vous donnez notamment une voix à l’enfant du couple qui se sépare, une voix essentielle. Vous aviez envie qu’il ait toute sa place dans ce drame ?
Ophélie Cohen : C’était indispensable. Les enfants nous reprochent trop souvent de ne pas les écouter et/ou de ne pas les entendre. Sans être adepte de l’enfant roi, je suis assez d’accord et en tout cas en ce qui concerne leurs émotions. Ils n’ont pas toujours les mots pour les exprimer, ils ne savent pas toujours comment faire et surtout, instinctivement, ils les taisent. Un enfant en souffrance va rarement le verbaliser. Il va le faire savoir dans son comportement. Il va être plus renfermé ou plus violent, il peut développer des troubles alimentaires aussi. Il cherchera à attirer l’attention. Et, généralement, dans les cas de manipulation et d’aliénation, il ne dit rien. Il essaie d’être fort pour deux (lui et le parent aliénant). Il se plie à l’exigence de l’un ou de l’autre. Et qui pourrait leur reprocher ? Mettons-nous à leur place un instant. Comment réagirions-nous ? Nous n’avons pas tous les codes en tant qu’adulte, nous ne savons pas toujours comment faire, alors mettons nous un instant à la place de ces enfants. C’est ce que j’ai tenu à faire par la voix d’Aaron.

Bepolar : Il y a également un corps retrouvé mort et Nathalie, brigadier-chef à
la brigade des Mineurs, en charge de l’enquête. Qui est-elle ? Comment vous pourriez nous la présenter ?

Ophélie Cohen : Nathalie c’est un peu de mon ancienne binôme (elle a d’ailleurs son prénom), et un peu de moi. C’est un flic, qui a une vie équilibrée (nous ne sommes pas tous divorcés, alcooliques, suicidaires et torturés). Un flic qui a embrassé ce métier avec ferveur. Un flic qui a besoin de se sentir utile et pour qui le sens du métier est essentiel. Elle est beaucoup d’entre nous aussi. Je suis d’une génération de flic qui a choisi ce métier par vocation, nous sommes nombreux, silencieux par devoir, à travailler dans l’ombre pour l’ensemble de nos concitoyens.

Bepolar : Cela parle aussi du quotidien des forces de l’ordre, de leur manque de temps et de moyens pour traiter chaque affaire. Vous aviez envie d’évoquer toutes ces problématiques ?
Ophélie Cohen : Si je dis non, je ne suis pas crédible (rire). Comme je le disais plus haut. Nous sommes silencieux par devoir. Le roman est un très bon moyen pour transmettre des messages et faire apparaître une réalité qui est finalement peu connue. Le nombre de dossiers à traiter, l’urgence, les contraintes… Des lecteurs m’en ont fait la remarque. Peu de personnes savent que nous devons prioriser la douleur des victimes par exemple, peu de personnes savent dans quelles conditions nous travaillons réellement mais aussi l’impact psychologique que cela peut avoir sur nous. Une fois encore, dans ce type de service, nous traitons de l’humain. On ne vit pas de la même façon l’échec d’une enquête pour un vol de vélo que celui d’une enquête pour viol. Nous ne sommes pas des robots dénués d’émotion…

Bepolar : Le roman est sorti il y a quelques semaines maintenant, en avril.
Racontez-nous comment vous avez vécu cette période où vous avez pu le présenter aux lecteurs et lectrices ?

Ophélie Cohen : La sortie d’un roman est un grand moment pour nous, chargé de doutes et de joies. Les retours sur Suspicion(s) sont, à ce jour, très positifs. Beaucoup de mes lecteurs ont découvert l’aliénation parentale mais aussi les drames du quotidien. Le livre bénéficie d’un vrai soutien de la part d’associations qui militent pour l’égalité parentale et contre l’aliénation parentale (l’ ACALPA, Égalité parentale pour ne citer qu’elles). Il m’a permis aussi de faire de belles rencontres et de me poser la question d’un investissement plus actif aux côtés de parents engagés. Aucun enfant ne devrait être privé de l’un de ses parents par volonté de revanche ou comme moyen de punition, et encore moins être utilisé comme une arme à l’encontre de l’autre.

Bepolar : Quels sont vos projets ? Sur quoi travaillez-vous ?
Ophélie Cohen : Mon troisième roman est en cours d’écriture. Il sera très différent des deux précédents. Plus « classique ». J’avais besoin d’écrire quelque chose qui me prendrait moins aux tripes, de plus « divertissant ». Pour autant, il aborde aussi des sujets difficiles et d’actualité.

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